I say yes, I say no…

Je ne sais pas si vous (et là je m’adresse uniquement à une moitié de mon lectorat), je ne sais pas si vous, donc, mais moi, il y a des jours, j’ai tellement l’impression d’être une femme que ça me déprime.

Enfin, l’impression.

Je suis une femme évidemment, et je ne m’en plains pas forcément (à part quelques jours par mois où je veux mourir) mais le truc c’est que parfois je m’entends parler et j’ai vraiment l’impression d’être une caricature de femme. Une « fille ». Et ça, ça m’énerve, d’être « une fille ».

« Non, je veux pas de gâteau, je suis au régime (…) je peux finir tes frites ? »
« Non c’est bon je n’ai pas besoin de cadeau (…) Comment ça tu ne m’as rien acheté ? »
« Bon tu peux me laisser bouquiner en paix 5 minutes (…) Qu’est-ce qui se passe, pourquoi tu me laisses toute seule ? »
« Pas de souci, je vais m’en occuper (…) ben dis-donc tu pourrais me donner un coup main ! »

AFFREUX.
INSUPPORTABLE.
Je m’achèterais pour me donner des baffes.

Le pire c’est que je m’en rends compte au moment où je le fais, mais c’est plus fort que moi. Dire oui quand je pense non, et dire non quand je pense oui. Enfin c’est plus fort que ça même : je dis oui et je pense oui, mais trèèèèès loin au fond de moi, dans le noyau interne de mon subconscient, c’est non. Et inversement, bien sûr. Alors, je sais qu’on passe pour des chieuses, mais franchement si c’est compliqué pour les mecs, moi je trouve que pour nous les femmes c’est carrément tuant de vivre en étant comme ça. (Au passage quand même, quand une fille dit non en criant et en se débattant, c’est que c’est VRAIMENT non, même dans les couches inférieures de son cerveau reptilien).

Vous le saviez déjà, naturellement.

Une chose que vous ne savez peut-être pas mes amis, c’est qu’il y a des féministes qui se sont penchées sérieusement sur la question de qui dit oui avec sa tête / qui dit non avec son cœur comme l’a écrit le poète. Et la conclusion c’est qu’apparemment, si on fait ça nous les filles, c’est pas forcément qu’on est des emmerdeuses professionnelles, c’est juste qu’on a été éduquées, conditionnées, lavagedecervellées, et ce pas seulement par nos parents ou nos grands-parents, mais par des centaines et des milliers d’années de civilisation. La femme qui, selon la première version de la Bible « homme et femme il les créa », est un être humain comme les autres. Un être humain qui donc, comme tout être humain, pense au sexe, voire fantasme (si !), aime manger des trucs gras (pas seulement du sucre), aime picoler aussi de l’alcool fort (pas que du kir royal, selon la version de Florence Forresti). Un être humain qui, d’une façon générale, est aussi parfois égoïste, paresseuse voire même, VOIRE  MÊME, en colère. Mais le fait est que, avant d’être tout ça, la femme est opprimée, soumise. Parce que, quoi qu’il en soit, dans la société, la femme est censée être une « good girl », c’est tout. Good girl, je ne sais pas comment traduire ça en français car ça veut tellement dire ce que ça veut dire en anglais. Good girl, pensez : Kate Middleton, qui fait trois bébés en quatre ans (et encore, d’après « US weekly », ce serait des jumeaux). Rester dans le rang, apporter la bière, dire ce qui fait plaisir, faire chauffer la pizza, agir de la façon conforme à ce qu’on attend de nous quand on veut désespérément faire autre chose (Boire des cocktails avec le maître-nageur). Bien sûr au 21eme siècle, des Kate Middleton ça ne court pas les rues ni même les palaces, heureusement, mais enfin – regardez comment sa frangine libérée passe pour ce qu’elle n’est pas.

Non, ce n’est pas facile d’être une femme, je me dis certains jours. Même si on a fait beaucoup de progrès, c’est dans l’inconscient collectif et surtout dans l’inconscient féminin. On n’arrive pas à exprimer ce qu’on veut vraiment parce qu’on pense que ce n’est pas avouable, alors on dit ce qu’on est censé dire, ou plutôt, ce qu’on pense être censées dire. Même si ça n’a plus de raison d’être. Par exemple, au 21eme siècle on peut tout à fait demander à son mari de faire une lessive, mais on n’ose pas (1), d’où le fameux : « Laisse, je vais le faire » qui nous vient si naturellement. On appelle ça un atavisme, la résurgence obstinée de quelque chose de très ancien. La société a tellement voulu nous mettre au pas qu’au final on est devenues des emmerdeuses et ça ne nous rend même pas heureuses (Rime riche vous remarquerez, presque un alexandrin).

Alors voilà, pour le bien être de mes paroissiens et surtout de mes paroissiennes, cette saison (liturgique, c’est à dire l’Épiphanie qui se finit juste avant le Carême) j’ai proposé une étude biblique sur les « Bad girls » et pas n’importe lesquelles, les bad girls de la Bible, ou plutôt les bad girls de la Genèse. Des bad girls, bien sûr, il y en a plein dans la Bible. Pas seulement l’effroyable Jézabel qui n’hésitait pas à faire assassiner son voisin pour pouvoir agrandir sa terrasse, mais même des femmes presque au-dessus de tout soupçon comme Rebecca, qui a quand même berné son mari sur son lit de mort pour faire hériter son fils préféré (car elle avait un fils préféré, la coquine). Ce qui est drôle car, quand on y réfléchit, la Bible c’est plutôt une histoire de bonhommes, et surtout la Genèse avec les fameux patriarches : Abraham, Isaac, Jacob, tout ça. Oui, mais quand vous y regardez de plus près, c’est souvent des femmes qu’il y a derrière tout ça, des femmes qui pleurent ou qui rient, des femmes qui tirent les ficelles, manigancent ou qui essaient juste de survivre, des femmes pleines de contradictions, de talents et d’idées préconçues, des femmes pleines de rancune et d’affection, à la fois jalouses et compatissantes, bref, pas des good girls, juste des femmes comme vous et moi. Des femmes que Dieu aime – follement.

Car une chose qui m’a frappée quand on a étudié l’histoire d’Ève, la seconde version, Ève qui sort de la côte d’Adam et qui croque la pomme tout ça, c’est que Ève c’est un peu le summum de la création. Le truc qui manque pour que tout soit parfait, et aussi, paraît-il, que Dieu a créé en dernier pour qu’elle ne puisse pas lui expliquer comment s’y prendre pour faire le monde (une blague misogyne que je trouve néanmoins très amusante). Bien sûr, Dieu a déjà bien compris car il crée Ève pour « aider », non pas lui, il gère, mais Adam – car Adam, il ne s’en sort pas tout seul pour trouver le sucre dans le placard (2). Ève est maligne, dégourdie, pas froussarde, elle discute avec le serpent, pose des questions sur la vie et sur la mort, sur les interdits et pourquoi elle ne peut pas être comme Dieu, après tout, belle mais aussi intelligente en plus. Etc. Pendant tout ce temps, Adam est planqué derrière en attendant de voir ce que ça donne tout ça, et quand elle lui dit : « Tiens mange, c’est bon pour toi », il fait mais il n’y est pour rien. Typique.

Bien sûr, je caricature, mais pour la première fois en lisant la Bible j’ai réalisé que l’Écriture n’essayait pas de nous dire pourquoi la femme est inférieure à l’homme, les auteurs de la Bible essaient d’expliquer – expliquer pas justifier – pourquoi, dans ce monde, cette société telle qu’elle est aujourd’hui, au moment où ils écrivent,  la femme est déchue à un rang inférieur à l’homme. Ils essaient de donner du sens à une situation qui n’a pas lieu d’être. C’est un peu ça la Genèse, c’est un livre qui essaie de répondre à la question : Qu’est-ce qu’il s’est passé à l’origine pour que le monde soit devenu comme ça ? Dieu a crée la femme pour être une compagne pour l’homme et l’homme pour être son compagnon. Amis, pas rivaux comme cela l’est si souvent, y compris, et même dans la plupart des cas, au sein des couples eux-mêmes. Des théologiens ont même approfondi la question en parlant de l’Adam et de l’Ève comme de principe féminin et de principe masculin, ce que je trouve être une explication assez satisfaisante pour les homosexuels. Enfin je ne sais pas ce qu’ils en pensent. Quoi qu’il en soit, voilà ce que dit la Bible: La femme, trop maligne, aurait à l’origine profité de la situation pour rompre l’équilibre avec son compagnon et la voilà déchue. L’homme, ne sachant pas la gérer, la fait taire. Essaie.

Mon mari, qui ne me fait jamais taire mais bien souvent me laisse parler, aime bien Ève dont il a pris cette jolie photo.

Ils ne sont pas tous comme ça, évidemment. Mon mari, qui ne me fait jamais taire mais bien souvent me laisse parler, aime bien Ève dont il a pris cette jolie photo.

Alors, est-ce que Dieu aime les femmes ou est-ce qu’ils les condamne à « accoucher dans la douleur » et à « désirer des hommes qui les font souffrir » (texto) ? Vous connaissez ma réponse bien sûr. Mais je m’en vais vous expliquer pourquoi, Dieu nous aime quand même, voire même follement.

Le problème c’est que ce qu’on lit dans la Bible comme une condamnation, c’est bien souvent seulement une conséquence. Une loi de la vie. Dieu dit : « Si tu fais ça, il va arriver ça. C’est tout. Dans la vie spirituelle, il y a des risques, exactement comme dans le monde matériel, se coucher sur les rails ou boire du liquide de refroidissement ça n’est pas recommandé car ça peut être dangereux. Le monde spirituel, comme le monde physique, a ses règles. Prenez le monde psychologique, à la frontière des deux. On lit souvent dans la Bible que : « La faute des pères retombent sur les enfants ». Eh bien, franchement, c’est affreux, mais qu’est-ce qu’il y a de plus vrai que ça ? Que les choses qui ne sont pas dites, pas faites, les secrets de famille, se transmettent comme la peste, comme l’inceste et comme l’alcoolisme, de génération en génération ?

Ève donc a fait une connerie. Je ne cherche pas à la défendre, mais je peux aussi la regarder avec compassion, comme Dieu qui, après l’avoir sérieusement engueulée, lui tresse un petit pagne car elle commence déjà se regarder de travers, se trouver trop moche, trop grasse, trop ridée. D’ailleurs Ève ne lui en veut pas non plus. À la naissance de Caïn elle s’écrie : « J’ai fait un enfant avec Dieu ». C’est pour dire.

Pas très sympa pour Adam bien sûr. Les femmes sont compliquées, c’est bien connu. Mais Dieu sait que aussi quand Ève a dit oui au serpent, elle pensait certainement non. Elle voulait sans doute juste lui faire plaisir, elle essayait seulement d’être une gentille fille, au final.

Tout ça pour, à la base, faire une courte introduction et vous présenter de jolies photos, enfin plutôt de jolis tableaux, enfin plutôt de jolies filles, du fameux Art Institute de Chicago. Parce que les filles on a beau dire, on se trouve plutôt moches, mais au final on est plutôt pas mal quand on regarde bien. Je me tais maintenant, profitez.

(1) Le fait de mettre ça par écrit, je me sens vraiment débile. Dites-moi que ce n’est pas que moi qui pars du principe que je suis de corvée de lessive comme les légionnaires sont de corvée de patates.
(2) Si quelqu’un a la moindre idée de pourquoi les hommes ne trouvent rien dans les placards, tiroirs, frigidaires, je suis preneuse – c’est pour moi un mystère presque aussi insondable que celui de la Sainte trinité (presque).
Publié dans Non classé | 5 commentaires

Once Upon a Time in the Midwest…

Mes lecteurs sont comme moi : ils aiment se cultiver et faire des découvertes et ce dans de bonnes conditions, si possible. Maintenant que vous savez que le Midwest est à moitié à l’Est (c’est un peu comme la bouteille à moitié pleine ou à moitié vide, vous noterez), profitez donc du confort de votre canapé ou de la chaleur du bureau  – je dis ça pour Zaza – pour faire ce petit tour virtuel de Chicago.

Publié dans Non classé | 4 commentaires

Sortez couverts

smallDSCF8908Pour les vacances de Noël, avec Xavier, on a eu une idée comme une autre : aller à Chicago. Enfin, quand je dis « une idée comme une autre »,  apparemment pas vraiment.  D’après un bref sondage dans notre entourage immédiat, pendant l’hiver, les américains préfèrent aller se balader du côté de Cancún ou en Floride – à Hawai pour les plus fortunés ou les plus présidentiables d’entre eux. N’importe où mais pas dans le Midwest.

Le Midwest, cette partie bizarre des États-Unis – car on dira ce qu’on veut mais enfin pour moi « Midwest » ça veut dire « à moitié à l’Ouest » alors qu’au final le Midwest c’est le Nord Est, toute la partie qui n’est pas directement sur la Côte Est : Indiana, Wisconsin, Illinois, « Les grands lacs » si vous préférez. Je vous explique ça sur un ton détaché, comme si c’était une évidence, mais enfin, il m’a fallu quatre ans pour comprendre, ou plutôt quatre ans pour avoir la curiosité d’ouvrir la Wikipédia à « Midwest ». Jusque là le Midwest quand j’en entendais parler, je me contentais jusque là d’assumer que c’était « quelque part dans le centre, mais plutôt du côté gauche sur la carte » mais quand mon chef m’a dit après le service de dimanche, alors que je lui annonçait gaiement et naivement que je me dépêchais pour ne pas louper mon vol – en mode « Curé de Cucugnan » (1) j’en avais même oublié mon livre de prières dans la sacristie – mon chef donc qui me dit : « Vérifie les horaires pour ton avion, car ils annoncent une tempête sur le Midwest ».

Et c’est là donc, sitôt rentrée à la maison pour récupérer mes bagages que, PC sur les genoux, page météo d’un côté, page Wikipédia de l’autre, j’apprends que le Midwest, c’est le nord des États-Unis, 12 États dont notamment le Wisconsin, l’Indiana et l’Illinois, capitale du Midwest au centre de ces trois États : Chicago, Illinois (Prononcez « illi-noye », pas « illi-noix »). Trop injuste. Le Midwest, c’était censé pour moi être chez les ploucs et surtout c’était censé être à l’Ouest et pas ma destination pour les vacances et là où une tempête arrivait dessus. Bref, le Midwest, grammaticalement et littéralement, c’est un faux ami.

On nous avait prévenu pourtant, mais à croire que l’optimisme à l’américaine c’est contagieux, ou c’est juste qu’on s’habitue. Avant un américain qui ne manifestait pas un enthousiasme débordant pour quelque chose, pour nous ça allumait une lanterne rouge, parce qu’ici un truc qui n’est pas d’emblée « awesome » vous pouvez être sûr que c’est vraiment vraiment pourri – et là personne ne s’enthousiasmait plus que ça quand on partageait notre projet pour les vacances. Même Catherine ma directrice spirituelle qui me soutient à 100 % sur tout, Dieu, moi, le monde, ma réforme de l’église, Catherine m’a dit : Chicago, c’est vraiment super mais enfin plutôt au printemps.

Avec Xavier, et parce que ça fait des lustres qu’on a envie de visiter Chicago – surtout depuis qu’on a fini la cinquième saison de « Goodwife » et même si on sait pas bien où c’est – on s’est dit : « Tant pis, si dehors il fait froid on n’aura qu’à bien se couvrir » comme le dit la chanson. Après tout, on était en mode « tourisme urbain », ce n’est pas non plus comme si on allait faire l’ascension du Meru (sur lequel on avait vu un documentaire la semaine même, ça nous avait boosté). Le soleil, la plage ce n’est pas vraiment pour nous. Les crocodiles et Disney World non plus. Pour les vacances, on préfère les musées et le métro.

100_4727_smallSauf que. Sauf que, Dieu nous ayant épargnés après un vol sans histoires (Je reprends espoir, Dieu doit finalement avoir des projets pour moi ou c’est juste qu’il y a au séminaire encore plein de PC à dépanner), bref, au final la tempête est vraiment arrivée lundi matin – alors qu’on déambulait tranquillement entre le Starbucks, le bureau de poste où on était allé acheter des timbres (vous verrez désormais vos cartes postales d’un autre œil), et le fameux musée d’art de Chicago – classé meilleur musée du monde par je ne sais plus qui – un vrai piège à Belanger.

C’est là qu’on a compris pourquoi Chicago aux États-Unis, ce n’est pas d’abord la cité d’Al Capone, c’est la « windy city ».

Une tempête de glace horizontale. D’un coup. Un coup de vent incroyable, soudain, avec plein de grêlons dedans. Pour moi, du jamais vu. Ou plutôt justement impossible de la voir, car quand vous avez de la glace qui vous arrive dans les yeux, c’est juste impossible d’avancer, de reculer, de rien faire. Et c’est la première fois de ma vie que je cherche autour de moi dans la rue un refuge immédiat. Refuge trouvé sous un porche de restaurant en toile, porche qui n’était pas sans me rappeler la petite tente suspendue à la roche des alpinistes du Meru dans laquelle ils étaient restés coincés quatre jours pour cause de tempête – l’un des alpinistes commentant : « Je me suis toujours demandé comment j’allais mourir et ce jour là je me suis dit : maintenant je sais ». La vérité quand même c’est que je n’avais pas trop peur de mourir – je me suis bien habituée question catastrophes climatiques – mais enfin un peu peur de rester bloquée une heure ou que Xav s’envole (j’ai moins d’inquiétudes en ce qui me concerne, le régime américain faisant son œuvre). Mais Dieu était avec nous une fois de plus car le truc incroyable et vraiment providentiel, c’est que les gens du restaurant  sont venus nous ouvrir et nous ont fait passer par un centre commercial qui arrivait juste devant le musée, le truc encore plus incroyable et providentiel c’est qu’avait pris refuge avec nous une famille de français – Joyeux, de bonne humeur, ils nous ont appris qu’ils étaient en fait réunionnais – et le truc encore plus incroyable c’est que devant le musée on a fait comme tout le monde, on a fait la queue sous la grêle parce qu’à Chicago, une tempête de glace c’est pas considéré comme une urgence ou une nuisance – les chicagolais en mode business as usual, limite genre :  faites un trou dans la neige si vous avez froid et essuyez-vous les pieds avant d’entrer s’il vous plaît.

Après ça, ça c’est un peu calmé, enfin le lendemain, après avoir marché jusqu’à mi-mollet dans des flaques de neige fondue, après que Xavier ait manqué de se faire assommer par un bloc de glace tombé d’un immeuble, après que j’ai eu séché mes bottes au sèche-cheveux à l’hôtel, après tout ça, donc, le lendemain ça allait mieux. On a pu se perdre (littéralement) sur le campus de Chicago – parce que on a beau avoir fait quatre ans aux États-Unis on croit toujours qu’on peut facilement s’y déplacer à pied (non), que : « Ça doit pas être si grand que ça » (si). Bon, j’ai râlé au début, mais après j’ai reconnu le décor de la première scène de « Quand Harry rencontre Sally », ça allait mieux. On a pu visiter le musée des sciences et de l’industrie et surtout on a pu voir le Millenium park, que j’aurais détesté rater même si du coup je n’aurais pas su ce que j’avais manqué : la vue panoramique sur les gratte-ciel et le lac Michigan.

Sortez couverts : À Chicago ils ont bien compris le complexe de la "trump Tower"

« Sortez couverts » : À Chicago ils ont bien compris le complexe de la « trump Tower »

Et une Trump tower aussi, parce qu’il ne faut pas déconner non plus, et aussi juste le charme discret de la ville et so Chicago : la cuisine italienne, la pizza « deep dish » à la pâte épaisse, le métro aérien qui zigzague entre les immeubles (et sous la pluie).

Au troisième jour on était comme chez nous. Quand on a vu qu’une tempête de neige commençait pendant le petit déjeuner, j’ai dit à Xav : « Allez on s’en fout on appelle un taxi et on va au musée » (en l’occurrence le fameux « Aquarium »  au bord du lac) parce qu’on savait que même marcher jusqu’au métro c’était pas envisageable.

On avait compris le message.

Vous me croyez si je vous dis qu’on a quand même passé de super vacances ? C’est comme ça. L’Esprit du Meru, c’est comme le Saint Esprit et le vent : il souffle où il veut – dans le Midwest y compris.

Atchi !!

Juste avant de repartir à la maison, complètement acclimatés...

Juste avant de reprendre l’avion, complètement acclimatés, on avait tombé la chepka (et j’avais perdu mon bonnet)…

Xavier a "deep dishé"pour vous...

À l’aéroport, Xavier a « deep dishé » pour  la science et pour vous…(Oui ce morceau de quiche, c’est une pizza !!)

 

 

 

 

 

 

 

Et plein de jolies photos à venir dans le prochain post !!!

(1) Le curé de Cucugnan, mes amis, je crois que je vous en ai déjà parlé. Il avait été damné pour avoir bâclé ses messes de Noël dans la grande hâte qu’il avait de réveillonner. Une histoire de Daudet je crois. Je pourrais chercher sur la Wikipédia mais maman va mettre un commentaire. C’est une histoire qu’elle me racontait quand j’étais petite. Pour me préparer à ma vocation, j’imagine. Le pire c’est que ça a marché.
Publié dans Non classé | 6 commentaires

Let your heart be mari

WP_20151212_16_35_22_Pro

La photo de la semaine, c’est Xavier qui porte une cravate.

Euh non, pardon, la photo de la semaine, c’est Xavier qui pose avec sa certification CISSP, Certified Information Security System Professional, un bien long titre pour dire que les hackers et spammers en tout genre n’ont qu’à bien se tenir, et qu’au séminaire ça ne va plus rigoler question sécurité informatique – même si déjà ça ne rigolait pas beaucoup, là au moins c’est officiel, Xav a un titre qui peut le prouver.

À cet important accomplissement professionnel, je suis heureuse de vous annoncer que vient de s’ajouter le passage de grade de Kempo, avec l’obtention de la ceinture « Bleue sur les bords, noire au milieu », comme quoi Monsieur ne se contente pas d’assurer une sécurité purement virtuelle, mais peut se servir de ses bras (et de ses jambes) à l’occasion.

Et si je vous dis qu’il a rejoint la chorale de l’église pour Noël ?

Tête, corps, esprit, moi je pense que ça vaut bien un « Manager of the year » pour un soon to become citizen...Ce qui est sûr en tous cas, c’est qu’il obtient à nouveau le mari d’or pour la huitième année consécutive, m’ayant soutenue depuis le commencement sur cette longue route qui m’a enfin menée à ma première église.

Vous souhaitant à tous et toutes une très bonne année, que vos rêves se réalisent, que vos dons soient bien employés et surtout que vous puissiez partager vos joies et vos peines avec ceux que vous aimez.

HAPPY 2016 !

Publié dans Non classé | 10 commentaires

Your own personal Jesus

Aujourd’hui avec Xav pour se mettre dans l’ambiance, on est allés voir des crèches à la cathédrale épiscopale de Washington. Vous me direz, c’est un peu tard pour se mettre dans l’ambiance vu qu’on est déjà le 26 décembre, mais enfin, chez les orthodoxes Noël dure 12 jours, un truc que les anglicans leur ont piqué, et puis ce n’est pas de notre faute non plus, c’était dur de se mettre dans l’ambiance pour la simple et bonne raison que le jour Noël j’étais en manches courtes sous mon aube – sans chasuble, sans pantalon – et je suais à grosses gouttes, l’air était lourd et orageux, les températures extérieures ayant atteint les sommets record de 22 degrés (Celsius). Et puis c’est vrai que ce premier trimestre est passé tellement vite, avec tant de choses à faire, qu’on n’a rien vu arriver. Pour la première fois de ma vie, j’ai été presque en retard sur mes cartes et mes cadeaux – Control freakage oblige, c’est aussi inhabituel pour moi d’être en retard que pour pas mal de gens d’être à l’heure – mais là la vérité, c’est que je suis tellement à la bourre que j’ai trois sermons de retard sur mon blog (Je note cependant que personne ne me les a réclamé, ouf !).

Je me rattrape tout de suite :

Sermon 1129 Sermon 1213 Sermon 1225

(Oui, le titre du sermon c’est la date, avec le mois et le jour inversé comme font les américains, par contre en anglais sermon se dit « sermon » ce qui est bien pratique).

Du coup, j’ai réfléchi à comment je pourrais essayer de résumer ce que j’ai voulu dire cette saison, en admettant qu’on ne me laisse que quelques lignes pour l’écrire – ce qui serait surprenant dans mon propre blog, mais sait-on jamais trop.

Eh bien je crois que cette année, justement, de ne pas être dans l’ambiance, ça m’a poussé à démythologiser. Démythologiser en théologie, ça veut dire – vous l’aurez compris – faire la part entre ce que les Écritures cherchent à exprimer sur la réalité divine et la légende – la petite histoire et bien souvent la politique. Le champion de le démythologisation, c’est Rudolf Bultmann – un allemand, comme tous les théologiens, philosophes et musiciens un peu sérieux. Mais enfin, Rudolf il est allé un peu loin quand même, pour lui l’évangile tout entier s’explique par ce que les premiers chrétiens essayaient de faire passer comme message et pour arriver à leurs fins, ils mettaient dans la bouche de Jésus les trucs qui les arrangeaient. Le problème c’est qu’à lire Bultmann, on se demande bien au final ce que Jésus a pu faire ou dire dans sa vie puisque tout a été réinterprété voire inventé plus tard, en fonction des circonstances. Je vous donne un exemple : Pour Bultmann, un truc comme Jésus qui parle à la Samaritaine au bord du puits, c’est des conneries, car les juifs et les samaritains ne pouvaient pas s’encadrer (vrai), mais comme les juifs étaient moyennement motivés pour se convertir au christianisme, et bien les disciples de Jésus ont inventé une histoire de samaritain pour balayer plus large et faire des recrues dans des cercles plus élargis que les synagogues locales. Moi je pense que c’est un peu abuser comme grille de lecture systématique mais enfin, Bultmann, il faut cependant bien lui concéder que mettre dans la bouche de Jésus des paroles qu’il n’a jamais prononcées, c’est un sport national dans l’église et c’est souvent un sport national aux USA, comme le fameux « Christ is the reason for the season » que les évangélistes reprennent en chœur au moment des fêtes : Noël n’a aucun sens si vous ne croyez pas en Jésus/Dieu, ce qui est  faux, complètement faux bien sûr puisqu’on célèbre le solstice d’hiver depuis la nuit des temps. Démythologiser donc.

Il ne faut cependant pas en rester là car le but de la démythologisation, telle que je la comprends, ce n’est pas bien sûr pas d’avoir l’air plus malin que tout le monde en étant pas crédule – quelque chose qui ne me déplaît pas tout à fait bien entendu – mais c’est plutôt d’arriver au cœur même de la chose, à la vraie signification, au-delà – par exemple – de Noël joie bonheur et cadeaux pour tout le monde. Je crois que mon message à moi, en tous cas pour cette saison, c’est que chercher Dieu c’est long et c’est compliqué, que c’est littéralement un travail, un accouchement qui a lieu dans le nuit, dans notre inconscient, dans les ténèbres, dans toutes ces choses que l’on ignore et que l’on met de côté. Il faut plonger au fond de soi pour trouver Dieu, ce n’est pas simple, ce n’est pas agréable et surtout personne ne peut le faire à votre place car Dieu et l’âme ne sont pas deux choses séparées qui se regardent en chiens de faïence, mais comme on dit joliment dans nos prières eucharistiques : Le Christ, la présence de Dieu qui a crée le monde et qui est venue l’habiter, il demeure en nous et nous demeurons en lui. Voilà en gros ce que j’ai prêché cette saison – si vous n’avez pas le courage de me lire jusqu’au bout.

Ce qui est étonnant c’est que ce soir là de Noël, je me suis dit, vu que j’étais pas du tout dans l’ambiance, que c’était foutu pour ressentir quoi que ce soit question présence divine. J’étais bien trop distraite par la chaleur, les enfants qui courraient dans l’église et surtout mon chef qui avait disparu pendant la moitié du service (en fait il était allé s’asseoir à côté de sa femme, mais enfin comme je ne pouvais pas le voir, j’ai cru qu’il s’était trouvé mal et qu’il allait falloir que j’assure pour lui). Mon chef qui va au restaurant entre les deux services du soir de Noël, ce qui est à peu près normal, il faut bien manger, mais qui, d’une façon intéressante, alors que je me plaignais d’avoir pour ma part une réservation de dernière minute, m’a annoncé que, heureusement, là où il allait « Ils avaient toujours de la place pour lui ».

« Ils ont toujours de la place pour lui »: Une réflexion sur laquelle j’ai médité longuement pendant que j’étais assise au bar, (oui j’étais assise au bar en tenue de pasteur, mais avec une limonade à la main) alors que notre restaurant à nous avait pris tellement de retard que nous avons attendu une heure pour manger, je me suis rappelée la légende – légende de l’Évangile néanmoins – qu’ils sont allés dans une étable, parce que, contrairement à mon chef, et à moi aussi minus une heure d’attente, il n’y avait pas de place pour eux dans une auberge. Et d’un coup ça m’est tombée dessus que non seulement Joseph et Marie n’avaient pas eu une journée facile, et que la crèche c’était loin d’être confortable – mais surtout ce soir là, après un long voyage, ils n’avaient rien eu à manger. Et la signification c’est que légende ou pas légende, c’est comme ça que Dieu arrive dans le monde, par des gens qui ont faim – par des gens qui cherchent, par des gens qui se posent des questions. La vérité de Noël, ce n’est pas la bouffe, c’est la faim. Et c’est là que je me suis dit : « Ça y est, je tiens mon sermon » – mais c’était trop tard évidemment, juste à temps pour un saumon rôti à point, une consolation.

Une autre consolation aussi c’est que quand je suis rentrée à la maison, après une soirée bien stressante au final et une saison pas vraiment de saison, les nuages dissipés, je me suis retrouvée sous un magnifique ciel de pleine lune, la première pleine lune un soir de Noël depuis – tiens donc, quarante ans – un halo de brume l’encerclait et dans toute cette étrangeté chaleur, solitude, lune un fort sens de la présence de Dieu, et je me suis rappelé un autre truc utile, c’est que oui, on a beau chercher mais enfin, c’est quand même LUI qui décide quand c’est le moment ou non.

Quelque chose que j’ai un peu tendance à oublier.  L’évangile on peut y voir un peu ce qu’on veut, je suis bien consciente de prêcher un Dieu philosophe car je philosophe sans doute un peu trop. En témoigne toutes ces petites crèches où l’on voit comment par le monde, chacun reçoit le message à sa façon.

Chacun voit Jésus à sa porte bien sûr, ce n’est pas grave. L’essentiel c’est de lui ouvrir.

(Cliquez pour agrandir)

Publié dans Non classé | Un commentaire

Felix Culpa

Les théologiens – qui décidément ne sont jamais en panne d’inspiration – ont un jour donné naissance à l’étonnant concept de « Felix Culpa » : O felix culpa quae talem et tantum meruit habere redemptorem, chante-t-on lors de la grande veillée pascale.

Pour ceux d’entre vous qui n’ont pas fait latin à l’école, ou qui ne lisent pas Saint Augustin avant d’aller se coucher, « Felix Culpa » ça veut dire la faute souhaitable, la chute bénie, le péché qui porte chance. Tout ce que vous voulez. Ça veut surtout dire, dans la tête des théologiens, que finalement le coup de la pomme, Adam et Ève, le serpent, êtres virés du paradis –  tout ça finalement ça n’est pas si grave puisque cela nous a valu d’avoir un Rédempteur, le fameux Jésus-Christ, qu’on ne présente plus, descendu du Ciel pour sauver les hommes (et on ajouterai « les femmes », depuis peu).

Alors là, autant d’habitude je trouve l’église plutôt rigide et moralisatrice à l’excès, autant le coup de « Felix Culpa » je n’adhère pas du tout. Les théologiens, je trouve ça même extrêmement léger de leur part, si vous me permettez. Parce que franchement, sans être moralisatrice, moi je pencherai quand même plutôt du côté de dire que sans le péché, le monde irait peut-être un peu mieux. Après c’est chacun son opinion bien sûr, mais enfin un monde sans meurtres, sans mensonges et sans cupidité, ça pourrait être pas si mal que ça non plus – sans compter qu’un monde pareil, pas dit que ledit Jésus-Christ n’aurait quand même pas eu envie de le visiter, sans compter qu’il aurait pu y faire un séjour plus agréable, surtout sur la fin. Il aurait peut-être passé ses vieux jours dans une petite bicoque sur la plage, peut-être sur la côte grecque, ou en Crête, il aurait écrit des poèmes ou ramassé des coquillages avec ses petits-enfants, ou peut-être qu’après quelques visites réussies à Jérusalem il aurait continué à fabriquer des meubles dans son petit village – peut-être qu’avec l’expérience il serait devenu luthier – bien que personnellement je l’imagine plutôt en train de construire des ponts et des passerelles, ou plus modestement (comme cela lui siérait bien) des portes et des fenêtres.

Mais bon, que les choses auraient pu mieux tourner, et de façon plus agréable, à la fois pour les hommes (et les femmes) et aussi pour Dieu, c’est le point de vue des franciscains qui sont connus pour leur petite vertu y compris hors de l’église. Les franciscains, mes amis, ce sont les fameux moines réjouis, abrutis et ventripotents de Robin des Bois, des bouteilles de bière et des pubs de camembert. Alors vous voyez, ils peuvent bien prêcher ce qu’ils veulent, qu’on aurait pu vivre saintement dans le monde en se contentant d’être heureux et de ne blesser personne, la plupart des théologiens sérieux s’accordent à dire que meurtres mensonges cupidité tout va malgré tout pour le mieux dans le monde meilleur des mondes, car au final c’est indispensable : tout fait partie d’un plan divin aussi génial que mystérieux. Comme dirait l’autre O felix culpa quae talem et tantum meruit habere redemptorem. La vérité bien sûr c’est leur conviction profonde que sans péché pas d’église, et sans le péché tout ce petit monde a peur de se retrouver au chômage. Évidemment, vous pouvez aussi être une idéaliste comme moi, et vous dire que dans un monde sans meurtres sans mensonges sans cupidité, les gens auraient peut-être quand même été curieux de Dieu – voire même plus – et auraient voulu lui rendre gloire, apprendre à mieux le connaître et apprendre à mieux s’aimer, et on aurait pu avoir des églises chaleureuses et des prêtres au cœur léger. L’innocence est sans doute souhaitable, elle aussi.

Je dois appartenir à la race des moines ventripotents.

Ce qui nonobstant mon goût pour le fromage et les boissons alcoolisées fait partie des questions de fond que je me suis posé ces dernières temps – surtout après l’acquisition de ma nouvelle voiture que je ne vous ai pas encore présentée.

DSCF8726smallJe sais.

Et encore – vous n’avez pas vu l’intérieur.

DSCF8728smallMais figurez-vous, j’ai déjà pas mal culpabilisé devant tout ce luxe.

J’ai même fait mieux : J’ai culpabilisé sur le fait même de m’acheter une voiture. Récemment, je me suis ainsi surprise à fournir toute une liste d’excuses au téléphone à ma mère (qui ne m’avait rien demandé) pour l’achat de ladite seconde voiture: Xavier travaille, moi aussi, à part si on veut aller en ville on n’a pas de transports en commun, il y a peu de magasins où on peut aller à pied etc. avant de raccrocher et de me rendre compte comme une imbécile que c’est juste normal, quand mes parents travaillaient, eux aussi ils avaient chacun une voiture – comme quoi la thérapie a du bon.

DSCF8729smallBien sûr, bien sûr – j’aurais pu faire plus simple qu’une Lexus (dans Lexus, il y a luxe, même si vous n’avez pas fait latin) : intérieur ronce de noyer ou pas loin, les rétroviseurs qui s’ajustent quand vous faites une marche arrière, sièges chauffants ou climatisés, le LECTEUR MULTI-CD (Lecteur Britney/Taylor/Madonna – mon  « commute » est un vrai feu d’artifices), le GPS intégré et son charme vintage qui peut au passage parler la même langue que moi et même le fameux anti-démarrage codé, si vous avez bien suivi mon précédent article.  Je me suis dit : « Fanny, si le souverain pontife lui-même se contente d’une Ford Focus, peut-être que tu devrais te mettre au vélo ». Le Pape qui, notez l’ironie est lui-même franciscain, mais d’une franciscanisme originaire, celui de St François qui prônait la pauvreté, et non les conséquences de la licence théologique qui consiste à croire que le péché est une hypothèse dont on peut se passer. Quoiqu’ il en soit, j’ai fait preuve de bonne volonté. J’ai essayé ladite Ford Focus, une horreur, une boîte de conserve en plastique et le volant sur les genoux. Et c’est là, sur le parking du concessionnaire que j’ai eu une sorte de basculement théologique et que je me suis posée la question franciscaine : Le malheur est-il vraiment indispensable au plan divin ? Ou tout du moins le malheur est-il indispensable à mes projets ?

Surtout si on fait vite fait le calcul. Une Ford Focus de 2012 avec 30.000 miles c’est $10.000 et une Lexus de 2005 avec, hum, 106.000 miles, et bien c’est $10.000 aussi. Mais bon, les Lexus, ça tient le coup – ce que m’a garanti mon vendeur, qui, figurez-vous, a une Lexus lui aussi (C’est étrange, il m’est arrivé la même chose quand je suis allée acheter un téléphone, la vendeuse avait un Microsoft Lumia 640 elle aussi, je dois avoir des goûts de vendeur, je ne vois pas d’autre explication (du moins dans un monde sans cupidité et sans mensonges)). Mais donc, mon vendeur – je dis mon vendeur car c’est celui qui nous a déjà vendu la Buick – mon vendeur, fine mouche, qui n’a pas fait théologie ni latin mais a bien cerné mon côté « moine franciscain » (1) – et que j’ai fini par aller voir un samedi soir après avoir passer la journée à pleurer dans des Ford et grincer des dents dans des Toyota – m’a annoncé gaiement qu’il pensait « avoir la voiture parfait pour moi » et là, c’était tout simple, je n’ai même pas eu besoin de l’essayer, quand je suis arrivée sur le parking mon cœur a frémi et j’ai su – j’ai su que c’était la voiture parfaite pour moi et qu’il me la fallait.

Felix culpa, me direz-vous. Le péché qui tombe bien.

Je n’étais pas loin de penser la même chose quand Barbara, notre assistante à l’église et en passe de devenir une bonne amie (je ne sais pas au passage comment, vu la quantité de travail dont je l’assomme tous les jours) et donc Barbara monte dans ma voiture et me sort le plus naïvement du monde : « C’est magnifique mais je ne sais pas, je pense que je ne pourrais pas acheter ce genre de voitures sans culpabiliser » – c’est là que j’ai pensé cette pensée incroyable, cette chose inavouable – que je me suis bien abstenue d’exprimer ou d’avouer : « Un tel bonheur, ça vaut bien le coup de culpabiliser un peu ».

Le moine franciscain à fond les ballons. Et croyez-le ou non, j’ai appris que la prêtre qui avait mon poste avant moi, avait elle aussi une Lexus. Après m’être rendu compte qu’un peu de bonheur ne nuisait pas au plan divin, et malgré les réflexions de Barbara, j’ai décidé de ne pas me laisser démoraliser par les adeptes de la pénitence et du péché – même pas par Xav qui m’a fait le coup du mari malheureux puisqu’il a hérité de la Buick et m’a fait observer qu’il se déplaçait en « citrouille », tandis que je roulais en « carrosse ».

C’était sans compter sur le courrier de ce soir où d’une façon plutôt ironique General Motors nous écrit pour nous informer qu’ils se sont rendus compte que notre Buick (qui date quand même de 1998) a un défaut de sécurité : une fuite d’huile (on s’en est rendus compte) qui pourrait potentiellement mettre feu au réservoir. Autant vous dire que mon sang n’a fait qu’un tour dans mes veines. En un quart de seconde toute ma culpabilité rentrée, la culpabilité la vraie, m’est tombée dessus comme la petite vérole sur le bas-clergé. Jouer les moines franciscains pas de problème, mais certainement pas aux dépens de mon petit mari. Finalement dans la vie, comme sur la route, tout est une question de priorité. Il n’y a pas de mal à être heureux, tant que votre bonheur ne fait rien de mal. Une virage parfois difficile à gérer.

Rassurez-vous pour Xavier, à la re-lecture du dit courrier, on peut toujours rouler avec la Buick sans problème, mais enfin il vaut mieux la garer dehors au cas où.

Tant que le feu ne se propage pas à la Lexus, tout va bien.

(1) À noter que c’est le concessionnaire que m’avait recommandé ma psy. De mettre ça par écrit, je me rends compte comme tout s’enchaîne, c’est impressionnant. Dire qu’il y a des gens qui pensent que la vie n’a pas de sens.
Publié dans Non classé | Laisser un commentaire

The perks of being a wallflower

On m’a fait observer que mon dernier article manquait de photos, ce qui n’est pas faux – mais vous avouerez que les circonstances ne s’y prêtaient pas non plus. Mais c’est comme ça à l’église : les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Autant comme il aurait été déplacé de prendre des photos vendredi pendant l’enterrement, autant aujourd’hui après le service du dimanche, on se serait cru à la Fashion week tellement que les flashs crépitaient de partout.

C’était un peu la Fashion week, vous me direz.

Voyez plutôt :

100_4366small100_4373small

Poser bleu sur fond bleu et vert sur fond vert, je ne l’ai pas fait exprès mais je dois avouer que ça déchire – à se demander si je n’ai pas des pré-dispositions au mannequinat – fût-il mannequinat clérical : Je présentais la nouvelle collection 2016, non pas Hiver/Été mais Avent/Temps ordinaire marquées respectivement par les couleurs bleues et vertes, ma sœur ayant eu la gentillesse de réaliser rien que pour moi cette étole réversible.  Et comme ma sœur, c’est ma sœur, figurez-vous qu’elle est un peu comme moi : elle aime bien les paillettes, les fleurs et les oiseaux, et même les petits lapins (1). Il y a tout ça sur mon étole et mes paroissiens en ont eu plein les yeux.

Bien sûr quand on est prêtre, on est censé briller uniquement par son humilité et ne pas trop attirer l’attention sur soi. Autant vous dire que là c’était raté, il y a eu pas mal de remue-ménage dans les bancs où fusaient les « Amazing », « Her sister did it ! » et même un « Mais c’est magnifique » en français dans le texte. Un hommage bien mérité pour une créatrice qui ne demande qu’à percer de ce côté-ci de l’Atlantique.  J’avoue que moi-même, perdue dans la contemplation de mes petites étoiles, j’ai failli oublier de me lever après le sermon pour faire réciter le « Je crois en Dieu ». Manque d’humilité plus distraction et orgueil,  heureusement que j’ai l’absolution de mes « paroissiens employés gouvernementaux » qui m’ont expliqué avec tout le sérieux possible que l’aube du prêtre c’est comme l’uniforme des militaires : si vous pouvez faire une fantaisie pour sortir du lot, il ne faut pas hésiter. Ma sœur en tous cas n’hésite pas, et au final moi non plus.

Les jours se suivent et ne se ressemblent pas à l’église. Un jour on pleure, un jour on rit. On célèbre la création avec tout ce qu’elle est, des étoiles aux petits lapins et surtout, on célèbre l’existence avec tout ce qu’elle contient de triste et d’heureux. C’est un peu pour ça au fond qu’on a des saisons liturgiques – pour essayer de mettre d’ordre dans toutes ces émotions. L’Avent pour l’attente, l’Épiphanie pour la joie, le carême pour la repentance. Pour essayer de mettre un peu d’ordre dans nos vies. On a peu de contrôle sur ce que l’on ressent, ou ce que l’on vit. La seule chose qui peut faire la différence, c’est de l’offrir à Dieu. Bien sûr, faire un cadeau à sa sœur c’est toujours une bonne idée aussi !

Allez, pas du tout par vanité, mais juste pour vous laisser admirer le travail de l’artiste, je vous la refais en gros plan :

100_4369small100_4375small

 (1) Sophie, pour répondre à la question que tu ne vas pas manquer de me poser : Non, il n’y a pas d’écureuils sur mon étole.
Publié dans Non classé | 9 commentaires

How to bury a millionaire

Je ne sais pas comment vous avez commencé le week-end, mais moi, j’ai fait un enterrement. Je sais, vous allez vous dire: « Encore ? », pensant peut-être même : « Est-ce qu’on pourrait pas avoir un mariage, pour une fois, est-ce que ce serait pas plus sympa ? » et sur ce point je serais tout à fait d’accord avec vous. En deux ans de prêtrise, j’ai toujours zéro mariage à mon actif – la semaine dernière j’ai eu un couple au téléphone, mais je n’ai plus jamais eu de nouvelles – alors je me dis : soit j’ai pas de chance, soit je ne porte pas chance.

Ce qui pourrait être le cas, car j’ai encore récemment appris la séparation d’un couple d’amis, le quatrième couples d’amis en…deux ans (tiens donc). Alors, je ne sais pas ce qui se passe avec les mariages, je n’ai pas de recette, pour être tout à fait honnête avec vous je pense essentiellement que si mon propre couple tient cela repose uniquement sur le fait que mon mari a bon caractère (et aussi que quand on est linuxien, on sait, en général, éviter les tentations), mais une chose que j’ai remarquée c’est que ces couples ce sont tous des amis qui se sont rencontrés quand ils étaient étudiants, ou pas loin. Un des pasteurs qui m’a formée m’a expliqué un jour qu’avant les gens ne divorçaient pas parce qu’ils vivaient moins longtemps – ce que je trouve affreusement cynique mais enfin en y réfléchissant quand les gens vivaient cinquante ans, il y avait moins de cancers aussi. Et donc quand on est ministre de Jésus-Christ, on aimerait bien croire que l’amour est éternel, mais apparemment le mariage a bien souvent une date de péremption. Est-ce que c’est la crise de la quarantaine ? Est-ce que c’est l’épuisement d’avoir trop travaillé tout en élevant des enfants ? Est-ce qu’on change, tout simplement, est-ce que la vie nous change ? Est-ce que c’est mieux d’attendre d’être un peu plus vieux pour se marier (mais c’est aussi le moment où vos ovules commencent à vous lâcher donc ce n’est pas un bon plan)?  Est-ce que c’est juste une grosse connerie, de se séparer, ou est-ce que la connerie initiale c’est de se marier ? BREF, je n’ai pas la solution, ce qui ne m’a pas empêchée de me poser beaucoup de questions pendant les longues heures vides et blanches de mes nuits angoissées.

Du coup, au final, d’avoir un enterrement impromptu cette semaine, c’était presque un soulagement. En tous cas personnellement, ça m’a changé les idées. Au final, un mariage ce n’est pas toujours gai, et un enterrement ce n’est pas toujours triste non plus.

Surtout avec quelqu’un comme Robert, apparemment.

Mercredi quand mon chef a passé la tête dans mon bureau pour m’annoncer le décès de Robert, que sans mauvais jeu de mots nous ne connaissions ni d’Adam ni d’Ève, j’ai demandé à mon chef ce qu’on savait de lui, il m’a répondu : « Pour l’instant on ne sait pas grand chose, on sait juste qu’il est mort ». Mon chef est comme ça, un peu cynique parfois (décidément c’est une maladie). Par exemple, un jour que notre organiste se plaignait de devoir faire un service funéraire pour un athée, n’ayant aucune idée de la musique qu’il devait jouer pour l’occasion, mon chef lui a recommandé « Highway to hell ». Mais bon là apparemment Robert n’était pas complètement athée, d’après nos registres il était paroissien à St D’s de 1991 à 1995 – une courte carrière de chrétien cela dit- mais enfin, c’est pour ça que sa famille, dans son désarroi, nous a appelé.

Pour organiser un enterrement express en moins de 36 heures.

Amatrice de défis, j’ai quand même accepté de faire l’homélie funéraire – une grande première pour moi. (C’était pour me demander ça que mon chef passait la tête par la porte de mon bureau, le vendredi normalement il va au golf et là du coup qu’il prêchait déjà dimanche, il était bien emmerdé d’avoir tout ce travail en plus). Ce qui était nouveau aussi pour moi, c’était de préparer l’enterrement avec la famille. Jusque là, j’ai participé à des enterrements où tout avait été décidé avant avec le recteur ou la rectrice mais cette fois, j’étais là quand les gens sont venus nous rencontrer. Et là, le premier truc qui m’a fait bizarre c’est que c’était complètement « Business like » : Bonjour, asseyez-vous, alors à quelle heure on fait cet enterrement, qu’est-ce que vous voulez comme musique, qui va faire les lectures – avec cette touche typiquement pastorale qui consiste à demander aux gens leur avis sans en tenir aucun compte, juste en leur disant que malheureusement on ne peut pas faire comme ils veulent, mais bon on leur a posé la question. Enfin, j’imagine que ce n’est pas un truc propre à l’église au final, c’est business like. Mais bon, je ne sais pas si vous avez remarqué mais émotionnellement je suis un peu une éponge et du coup à force de parler business je commençais à « hyperventiler » comme on dit en américain. L’atmosphère était plutôt lourde et je n’arrêtais pas de penser « Ce n’est pas possible, ils se sont tous engueulés avant de venir » (ce qui évidemment arrive tout le temps aux enterrements, les gens préférant généralement être en colère plutôt qu’être malheureux, on les comprend). Au final, comme mon chef arrivait au bout de son truc, et qu’il demandait à la famille s’il avaient des questions et vu qu’ils n’en avaient pas, j’ai quand même levé la main pour poser LA question, celle qu’à mon avis on aurait dû poser depuis le départ, celle en tous cas qui ma taraudait l’esprit depuis le début – mais ce Robert, c’était qui au final ? Parce que oui dans l’église on fournit des services aux gens mais enfin, à la base, on est une communauté fraternelle et que si je prêche à l’enterrement de quelqu’un, j’aimerais bien savoir qui ce quelqu’un était. Je n’ai pas dit tout ça, bien sûr, mais j’ai juste demandé à la famille de me parler de lui. Et là mes amis, c’était comme de tordre une éponge gonflée d’eau, on a perdu dix kilos d’atmosphère lourde d’un coup. En tous cas moi j’ai commencé à re-respirer normalement car les visages se sont détendus, et chacun avait une anecdote à raconter.

Qui était Robert ? Si ses enfants nous l’on bien décrit, je crois cependant que c’est Barbara notre secrétaire qui a un sens de l’humour incroyable qui l’a le mieux résumé au final en me tenant les bulletins ce matin. C’était « A great catch » : Parce que la photo que ses enfants on choisi de mettre dans l’église c’est une photo de Robert, souriant et bronzé, beau garçon, qui pose sur son bateau avec un énorme poisson et qu’en anglais  « a great catch » ça veut dire « un bonne prise » mais ça veut aussi dire « un bon parti ». Autant vous dire que je suis partie faire le service à moitié hilare.

Robert ne m’en aurait pas voulu, car comme je l’avais appris, Robert, il aimait la vie. Et il pouvait se le permettre a priori. Ayant décidé à la fin de ses études qu’il ne travaillerait jamais pour personne, il s’était lancé tout seul dans les affaires, l’immobilier, si j’ai bien compris. Après avoir cherché son nom dans Google, j’ai compris qu’il aurait déclaré : « Dans ce monde, il y a  toujours moyen de se faire un dollar ou deux ». Apparemment il vendait tout ce qui pouvait se vendre et il en profitait. Non seulement il avait une maison à McLean – ce qui, croyez-moi, n’est pas rien – mais il avait un yacht et collectionnait aussi …les voitures de collections. Généreux pourtant, il a permis d’ouvrir la branche « Management » de l’Université de Virginie grâce à sa généreuse donation de…trois millions de dollars. Bref, vous l’avez compris, il n’était pas dans le besoin. Robert dépensait large, vivait large. Une vraie success story l’américaine.

« J’espère quand même que dans ton homélie tu ne vas pas dire qu’il passait son temps à dépenser son argent dans les casinos » m’a dit mon chef.

Et là mon sang s’est figé dans mes veines,  car 5 mn après la réunion j’étais déjà tapoter à fond les ballons sur mon petit PC un sermon qui reposait uniquement là dessus : que Robert était un entrepreneur, et surtout un joueur invétéré, qu’il dépensait sans compter, qu’il menait une vie risquée. J’ai pris une grande bouffée d’air et j’ai dit à mon chef : « Ben si en fait, je compte parler que de ça…mais dans une perspective chrétienne » (Et là mon chef m’a dit « qu’il plaisantait »).

Parce que oui bien sûr faire des affaires, dépenser des sous et même aimer l’argent, on peut voir ça d’un point de vue moralisateur – et je ne renie pas ce point de vue – mais cependant devinez quoi, la vérité est toujours plus compliquée qu’il n’y parait.

D’abord parce que Pascal a dit que la vie chrétienne, c’est le pari le plus fou qu’un homme puisse faire. Quand on est chrétien on mise toute sa vie sur l’existence de Dieu, même si on en a aucune preuve, on mise quand même parce que si on a la moindre chance de trouver Dieu, c’est tellement immense que ça vaut le coup de tenter le coup. C’est le pari le plus fou et en même temps le plus raisonnable : tout perdre pour tout gagner. C’est ce que font les joueurs, ce que font les investisseurs, c’est fou mais c’est tellement raisonnable car il n’y a que quand on accepte de perdre, de donner de soi, que l’on peut recevoir. Être chrétien, c’est vivre large, penser large, aimer large. C’est exprimer cette passion et cet amour de la vie qu’il y a en Dieu. Et cet amour de la vie prend bien des formes. Robert était un viveur certes, mais c’est aussi cette énergie qui lui faisait donner son argent à l’Université de Virginie, accompagner ses petits-enfants à tous leurs matchs à l’école, cultiver un petit jardin et ramener des légumes à ses infirmières et du poisson à son médecin. Robert aimait bien aussi partager son petit déjeuner avec son chien. Bref, j’ai dit tout ça dans mon sermon, et quand j’ai parlé du petit déjeuner avec le chien j’ai levé la tête et je me suis rendue compte que tout le monde m’écoutait. Une assistance de 200 personnes, je n’avais jamais eu autant de monde dans une église, et ça ne m’était jamais arrivée que tout le monde m’écoute en même temps. Et c’est tant mieux qu’ils m’écoutaient car ce que j’avais à leur dire c’était ça : Dans la vie, quand on est prêt à tout perdre et quand on donne tout, c’est comme quand on perd sa vie, quand on meurt : On peut aussi tout trouver et tout gagner. Si on a suffisamment la foi, suffisamment d’amour, on trouve Dieu et on gagne Dieu. Car ce qui compte dans la vie ce n’est pas de faire des affaires ou d’être quelqu’un, ce qui compte dans la vie c’est d’avoir un cœur suffisamment grand pour partager son petit déjeuner avec son chien (même si le bacon, au fond, ce n’était pas bon pour lui – la touche moralisatrice de mon sermon).

Alors je sais bien sûr, Robert aurait pu faire creuser des puits en Afrique plutôt que de partir en vacances dans les iles, il aurait pu sauver la banquise plutôt que d’acheter des voitures, nourrir les petits enfants du Tiers-monde plutôt que de claquer son pognon au casino. Je n’ai pas cherché à en faire un exemple de sainteté loin de là, j’ai juste cherché à dire que tous nous exprimons quelque chose qui vient de Dieu quand on a l’amour de la vie.

L’amour des autres aussi. Parce que je ne sais pas ce que Robert faisait pour les enfants d’Afrique, mais à la fin du service tous ses petits-enfants à lui étaient en larmes, n’en revenant pas que leur merveilleux grand-père soit à tout jamais parti. Ça m’a brisé le cœur de voir tous ces enfants en larmes, rappelé des souvenirs d’avoir perdu mon grand-père à douze ans, lui qui avait en commun avec Robert de partager son petit-déjeuner avec son chien (en moins lipidique car en France on ne mange pas de bacon). Ça m’a aussi rappelé ce que m’avait dit mon père le jour où on a descendu le cercueil de mon grand père dans le grand escalier en colimaçon de sa demeure provençale. Alors que mon oncle pleurait à chaudes larmes, non père m’a pris la main et m’a dit : « Ça pourrait être affreux, mais ça ne l’est pas car nous avons la foi. On est tous tristes mais pense à ton grand-père, comme il doit être heureux de revoir ses parents. Combien de temps cela fait à ton avis qu’il n’a pas vu ses parents ? Pense comme il doit être heureux ». Je ne sais pas mais je trouve que c’est une des choses les plus intelligentes et les plus affectueuses que l’on puisse dire à une enfant dans ces moments là. En tous cas moi ça m’a réussi puisque maintenant je fais des enterrements.

Quand on donne sa vie, quand on quitte sa vie, on trouve une vie plus large et plus grande. Je n’en suis pas certaine tous les jours, mais aujourd’hui j’en étais persuadée.

Ce qui m’a peut-être été confirmé par la suite. Car si la vie éternelle commençait pour celui qui jusque là avait seulement mené la grande vie, ma petite vie à moi continuait. Et après toutes ces émotions et ces histoires de petit-déjeuners, j’avais furieusement envie d’un egg sandwich. Et c’est là que je monte dans ma voiture qui n’est certes pas une voiture de collection mais pas loin, ma voiture de luxe d’occas que j’ai craqué la semaine dernière et que j’ai acheté avec l’intégralité des mes trois derniers salaires et de mes deux prochains (Travaillez pour vivre et ne vivez pas pour travailler qu’ils disent) – je ferai un article spécial là-dessus prochainement – bref, après tout ça, ma voiture de moins d’une semaine NE DEMARRE PAS.

L’horreur.

Car je veux bien faire des grands discours sur la vie et la mort mais une voiture de moins de une semaine qui rend l’âme, c’est comme qui dirait prématuré. Après avoir beaucoup hésité à appelé Xavier pour lui annoncer la terrible nouvelle, je suis d’abord allée trouver mon chef – qui sait ce qu’il faut faire dans ce genre de circonstances. Et donc mon chef – que je trouve j’ai beaucoup critiqué depuis le début de cet article – mon chef donc est immédiatement venu voir pour me dire qu’il ne pouvait rien faire et qu’il fallait appeler le garage – cette fois c’était moi qui étais au bord des larmes – cependant, est-ce sa pastorale présence, dans un dernier mouvement d’espoir, me remettant au volant je trouve ce qui manque : mon porte clé avait perdu la pièce qui contient la puce de sécurité.

Je re-respire un grand coup, tourne la clé. LA VOITURE DÉMARRE. Je en sais pas si c’est mon chef qui fait des miracles, mais la voiture était ressuscitée. Comme ça. Ou c’est peut-être Robert qui pensait que ce serait trop injuste que le petit prêtre après avoir prêché son enterrement loupe son petit-déjeuner.

J’ai conduit jusqu’à mon restaurant préféré et, à deux heures de l’après-midi, toujours en robe stricte et col romain, j’ai pris mon petit déjeuner. Un petit déjeuner en l’honneur de Robert, un petit déjeuner à la mémoire de mon grand-père, un petit déjeuner avec les morts – avec les morts qui sont parfois plus vivants que les vivants et certainement plus heureux au banquet éternel – j’étais bien.

L’amour est éternel, au fait. C’est juste qu’on est des grosses billes quand il s’agit d’aimer.

100_3012_small

Publié dans Non classé | 3 commentaires

Losing my religion

Comme ça, maintenant, avec toute mon expérience et ma maturité, j’ai bien envie de vous dire quelque chose comme : « Vous en avez marre de la France, vous voulez vivre autre chose ? Vous pensez à immigrer aux États-Unis ? Attention, c’est une fausse bonne idée ». Je pourrais vous dire ça, certes, mais je ne m’y résous pas. Parce que même s’il faut deux ans pour obtenir une carte verte qui n’est encore qu’une pseudo carte verte, on est quand même bien contents.

DSCF8421Quand j’y pense, je me dis que c’est bien marrant que les Hébreux aient identifié la recherche de Dieu à la recherche de la terre promise. C’est long, c’est douloureux, il y a beaucoup de moments de doute, mais au final c’est mieux que de rester sans rien faire à la maison.

L’immigration c’est comme la religion : le tout c’est de garder la foi.

Ou pas.

Parce qu’un secret bien gardé par les gens qui font le même métier que moi, c’est que Jésus, la religion, c’était pas vraiment son truc non plus. Dimanche dernier, l’évangile relate ce passage où Jésus sort du Temple et alors qu’un de ses disciples s’exclame sur la beauté et la solidité du bâtiment, Jésus prophétise sa destruction imminente (au temple, pas au disciple…quand même pas). D’ailleurs Jésus se prenait souvent le bec avec les prêtres et les responsables religieux – non pas parce qu’ils faisaient les choses pas assez bien, mais au contraire parce qu’ils faisaient les choses trop scrupuleusement. Ce qui compte bien sûr, c’est d’aimer Dieu et d’aider son prochain.

Alors, j’aimerais bien vous dire que la religion c’est une fausse bonne idée, mais je ne peux pas m’y résoudre non plus. Pour lire, il faut apprendre son alphabet. Mon amie et ex-professeure Maryvonne dirait : « Pour traduire du grec, il faut connaitre ses déclinaisons »- Ce qui n’est pas toujours vrai. En 7 ans d’études de grec tout cumulé j’ai toujours réussi à y couper, mais enfin ça aide quand même bien. Enfin disons, les gens qui prenaient des cours avec moi ça avait l’air de bien les aider de ne pas avoir à deviner à chaque phrase ce qui sujet et ce qui est complément. Mais je m’égare : tout ça pour vous dire que la religion, c’est un peu comme la grammaire  ça vous donne juste un langage pour parler de Dieu et pour le trouver dans votre cœur, avec les autres, et dans la vie de tous les jours. Une réalité qu’on ne peut pas nommer, c’est une réalité qui n’existe pas. On est comme ça, nous les humains.

Du coup la religion c’est comme l’immigration, pas toujours marrant mais il faut bien y passer pour rejoindre la terre promise. On peut même y trouver du plaisir en chemin. Non, ce qui est vraiment déprimant dans la religion, c’est d’en faire une finalité, alors que ce n’est qu’un moyen d’arriver quelque part.

Et du coup, c’est un truc que j’aime bien rappeler aux gens dans l’église, c’est qu’une crise de foi, ce n’est pas forcément grave – et c’est même parfois ça a du bon. Pour trouver Dieu, il faut aussi savoir le perdre, sinon vous pouvez être sûr que c’est un faux dieu qu’on vous a refilé. Une fois que vous avez appris les gammes, c’est à vous de créer votre propre partition. Le Dieu de la religion, c’est un Dieu présenté, expliqué, proposé. Ce n’est pas encore celui qui est vécu, ressenti, éprouvé. Ce Dieu que l’on se demande où il est quand on est en pleine souffrance – car justement on n’a que le Dieu des rites, et pas le Dieu des tripes (Oh joli ! Je l’ai pas fait exprès !…Je trouve une rime avec frites et je me fais éditer)

Bref, vous en saurez plus avec mon dernier sermon.DSCF8424

Sermon 1115

Publié dans Non classé | 2 commentaires

Le diable n’en rit plus beaucoup

(Scène de nuit, une femme entre deux âges, ou en tous cas fatiguée, sort d’une voiture côté passager, vieux modèle, il est tard, la femme semble légèrement éméchée – elle se dirige vers la boite aux lettres et sort une enveloppe qu’elle ouvre frénétiquement. Silence. Elle lève les yeux au Ciel, le voile se déchire)

Moi : Seigneur, c’est un miracle. Ça y est, j’ai ma carte verte.

Jésus : Déjà ?

Moi : Non, enfin c’est mon autorisation de travail temporaire, c’est un bon début. Tu avais oublié ?

Jésus: J’ai failli. Tu as été tellement patiente. Je disais hier justement aux anges: « Fanny on ne l’entend jamais se plaindre ». Félicitations en tous cas.

Moi : Deux ans et demi que j’attends, Seigneur ! Tu as vu la boite à chaussures sur le bureau de Xavier ?

Jésus : La boite IKEA ?

Moi : Ah tu as reconnu. Oui, et bien c’est tous les papiers qu’on a dû remplir. 1h30 de rendez-vous chez l’avocate rien que pour tout signer tout ça.

Jésus : Plus un saut chez IKEA.

Le diable (ironique, comme à son habitude) : Quel dévouement pour le royaume des cieux !

Moi : Qu’est-ce qu’il fait là celui-là ?

Jésus : Je ne sais pas, tu es venue avec lui ?

Moi : Non. Bon écoute, je sais que j’ai pas mal râlé mais avoue qu’un peu d’esprit franchouillard et syndicaliste dans l’église Épiscopale, c’est rafraichissant. Tu t’ennuierais sans moi.

Jésus (moqueur) : Je confesse à Dieu Tout-Puissant.

Moi: Sérieusement.

Jésus : Sérieusement. C’est pour ça que je t’ai fait venir, tu sais.

Le diable : Ah ben ça, nous aussi on s’ennuierait sans elle. Ça a été une sacrée épopée cette carte verte – si vous me passez l’expression. (Se tournant vers moi) Tu te souviens quand tu t’es mise à pleurer sur le parking après la visite médicale pour l’immigration ? Tout ça parce qu’ils t’ont fait une-radio-des-poumons.

Moi (me justifiant): Après m’avoir fait trois vaccins et une prise de sang ! Et parce que mon monotest était positif, pour faire la radio ils m’ont fait descendre trois étages, porter un masque dans la salle d’examen et ils m’ont demandé devant tout le monde si j’avais eu mes règles récemment (à part)…et puis merde, j’avais mes règles ce jour-là.

Le diable : Ah ah ah. Tu te souviens que tu voulais reprendre l’avion pour rentrer en France ? Heureusement que ton petit mari t’a emmenée manger un bagel pour te con-so-ler. Comme ce soir, il t’a dû t’emmener boire un coup pour oublier que la carte n’était toujours pas arrivée. Jésus, bravo, tu t’es trouvé une sacrée missionnaire. L’église est sauvée.

Jésus : T’occupe, c’est fait ça. Le monde est sauvé déjà, lui aussi, au cas où tu aurais oublié ta majeure défaite. (Se tournant vers moi) Bon alors ça dit quoi cette carte ?

Moi : Ben écoute, ils appellent ça carte verte mais ils devraient appeler ça carte blanche. Je peux aller où je veux en France, en Europe et bosser où je veux, autant que je veux, aux États-Unis. Le monde m’appartient.

Jésus et le diable (en chœur) : Le monde t’appartient ?

Moi : Façon de parler (me tournant vers Jésus) C’est un peu comme Saint Paul avec sa citoyenneté romaine, si tu préfères.

Le diable : Ah ben si ça te permet d’être décapitée au lieu de te faire dévorer par un fauve…

Jésus : Ah, ça peut être utile, en effet, avec ton chat tout ça. Dis-moi, si tu es comme Paul, tu es forte en écriture, correspondance ?

Moi : Ça dépend. Parfois quand j’écris je perds un peu le contrôle, surtout quand je manque de sommeil, j’entends des voix. Mais du coup, voilà, la nouvelle c’est qu’au bout de deux ans et demi, je vais enfin pouvoir être payée pour faire mon boulot.

Jésus (un peu surpris) : Ton boulot ?

Moi: Pardon Seigneur, ton boulot.

Le diable : Je ne veux pas me faire l’avocat de moi-même Seigneur, mais vous au bout de trois ans à travailler gratis, vous vous en êtes moins bien sorti.

Jésus : Hum. C’est parce que la Rédemption était gratuite et offerte à tous. (Interpellant Saint Pierre, ton faussement naïf) Simon-Pierre, ils en sont où à Rome ? J’ai manqué quelque chose ?

Saint Pierre (amusé): Seigneur, les temps changent. À Rome, c’est encore à peu près sous contrôle mais vous savez ce que c’est (soupir) les États-Unis d’Amérique : Les chrétiens chauffent les églises. Ils boivent du café et se fournissent chez IKEA. Il y a même des femmes prêtres de nos jours.

Le diable (à part) : Dommage, j’aimais bien venir me rafraichir des feux de l’enfer dans de grandes cathédrales glaciales et aux trois-quart vides.

Jésus (s’adressant à moi): Alors j’imagine que tu es officielle maintenant.

Moi : Je ne l’étais pas déjà avant ?

Jésus : Oh moi tu sais l’église – je n’ai pas toujours mon mot à dire.

Le diable (fait un sourire en coin et s’adresse à Jésus) : Et avec le gouvernement américain, vous en êtes où Seigneur ?

Jésus : J’imagine que c’est une question rhétorique (se tournant vers moi) Alors, ça y est maintenant ! L’ordination, le premier poste, le permis de travail. Quels sont tes grands projets du coup ? Annoncer l’évangile, partir en mission ?

Moi : Hum. On a discuté avec Xav. D’abord acheter une voiture, peut-être trouver un appart un peu plus grand, faire revenir les meubles de France. S’installer quoi.

Jésus : Tu pourras écouter tes CD dans la nouvelle voiture ? Les anges me réclament du Britney Spears.

Moi : Apparemment il y a même un lecteur mp3.

Le diable (ironique) : Que de beaux projets Fanny ! J’étais venu spécialement pour entendre ça et t’adresser personnellement mes félicitations.

Moi : Seigneur, je voulais nourrir les pauvres, mais apparemment il n’y a pas de créneau immédiatement.

Jésus (Saint Pierre lui murmure quelque chose à l’oreille) : Oui, il semblerait que de nos jours les pauvres ne peuvent plus se payer de religion, ou alors de la religion de très mauvaise qualité (éteignant la télé, puis consultant ses archives et interpellant Ésaie) Ésaie, on avait dit quoi déjà exactement ?

Moise : Seigneur, vous avez bien qu’il est sourd. Tenez, j’ai installé la Bible sur votre tablette.

Jésus (lisant à voix haute) : L’esprit du Seigneur, l’Éternel, est sur moi. Car l’Éternel m’a oint pour porter de bonnes nouvelles aux malheureux.  Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé. Pour proclamer aux captifs la liberté. Et aux prisonniers la délivrance.

Moi : Seigneur, est-ce que ça te fait te sentir un peu mieux de savoir que je n’en dors plus du tout ?

Jésus : Attends ! (Faisant rapidement défiler le texte) Ah, tiens, c’est de moi ça :  « La moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux » (à lui-même : « ah ben, il y a des choses qui ne changent pas ») « N’emportez ni argent ni sandales » (à moi : « Il me semble que tu avais laissé la KA en France ? ») « Dans toute maison où vous entrerez…mangez et buvez ce que l’on vous servira car le travailleur mérite son salaire » (éteignant la tablette du bout du doigt) Tout travailleur mérite un salaire, ma fille. C’est biblique. Et je rajouterai même : Il y a une limite au nombre de PC que Xavier peut dépanner tous les jours.

Saint Pierre : S’il pouvait venir dépanner notre salle serveur !

Moi : Non, mais ça va pas !

Moise : Pas d’inquiétude, tout est sauvegardé dans le cloud.

Jésus (à moi, doucement) : Alors tes papiers tout ça, tu es déçue, un peu?

Moi : Écoute Seigneur, je ne sais pas. Je pensais que notre amour ça serait si beau, si grand. je pensais qu’on serait au-delà de la vie de tous les jours. Qu’on irait à New-York. Je pensais qu’à nous deux, on sauverait le monde – et on se retrouve à acheter une voiture et chercher logement en banlieue résidentielle.

Ésaie : Qui ça ? Avec Xavier ?

Le diable : Mais non, avec Jé-sus. Ah ah, le quotidien, je n’ai rien inventé de mieux pour tuer l’amour. Les amis, les couples, même le bon Dieu. Ça marche avec tout le monde, je suis tellement fier de moi.

Jésus (à moi, visiblement peiné) : Tu penses que cet amour ce n’est pas beau et grand c’est ça ?

Moi : Mon Dieu ! Seigneur – pardon Seigneur – je n’ai pas dit ça. C’est juste que j’ai du mal à comprendre comment tout cela fonctionne. (Saint-Pierre dit quelque chose à Moise et ils s’esclaffent, puis d’un coup, grand silence)

 – Le Saint-Esprit fait son entrée –

Le Saint-Esprit (à Jésus) : Seigneur.

Jésus (au Saint-Esprit) : Seigneur.

(Le diable se carapate et quitte les lieux en claquant la porte, une bouffée de chaleur se fait sentir)

Le Saint-Esprit (s’épongeant, puis s’adressant à Jésus) : Alors, on en est où ?

Jésus : Il y a du progrès, mais parfois je me demande si on est bien clairs sur nos communications.

Moise : C’est vrai que du temps où le Père faisait la grosse voix dans le désert, ça passait un peu mieux

Saint Pierre : C’est la faute à toute cette technologie, tout le monde parle en même temps…

Moi (les interrompant) : Seigneur, je sens bien que quelque chose a foiré mais qu’est-ce que j’ai loupé Seigneur ? Qu’est-ce que j’ai loupé ?

Saint Pierre (haussant les épaules) : Tu t’attendais pas à ce que ça te tombe tout cru ? Tu pensais que tu allais trouver une place pour faire le bien et annoncer la foi, tu pensais que l’église c’était un endroit où aller et pas quelque chose à faire ?

Moi (angoissée) : Tu veux dire…tu veux que je réforme le système ?

L’Esprit-Saint (exalté) : Pourquoi pas ?

Thomas Cranmer (1) (qu’on avait pas entendu jusque là) : Knock yourself out!!

Moi : Seigneur, donnez-moi huit heures de sommeil et je changerai le monde.

Jésus (bâillant et regardant sa montre, la lune à côté de lui) : Pas de problème. J’ai toute confiance en notre équipe.

Saint Pierre (à moi) : Tu sais, avant de réformer le système, tu peux même commencer par simplement écouter ton chef et voir comment les choses se passent autour de toi. Après tout, Rome ne s’est pas faite en un jour !

(Fou-rire collectif, le rideau tombe et les cieux se referment – temporairement.)

(1) Thomas Cranmer qui a écrit la première et deuxième version du « Livre de la Prière Commune » est le père de l’anglicanisme. Officiellement, en tous cas chez nous, Henri VIII n’est qu’un accident de l’histoire. Apparemment pour faire une église, il ne suffit pas de créer une institution.
Publié dans Non classé | 4 commentaires