Cachez-moi ce Saint que je ne saurais voir…

indignant JesusUn bon sermon, c’est un peu comme une bonne publicité : Le tout, c’est de bien cibler.

Alors que prêche le Révérend Belanger aux pays des espions ? Qu’il ne faut rien cacher à Jésus, bien sûr.

Bon, encore une fois, si vous avez le courage de me lire, vous découvrirez que c’est quand même un peu plus subtil que ça. Enfin j’espère.

De façon surprenante pour certains, Dieu n’a rien contre ce que nous sommes vraiment – même si ce n’est pas toujours brillant à première vue. Ce qui l’énerve, c’est quand on fait semblant. Pas qu’il veuille surveiller nos petits secrets, c’est juste que si on passe sa vie à faire semblant d’être quelqu’un d’autre – alors dites-moi, comment devient-on jamais soi-même ?

La sainteté, ce n’est sans doute pas de singer une vie parfaite, c’est d’avoir une vie qui se laisse transformer.

Sermon 0927(4)

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Take Me to Church

Une des difficultés qu’il y à passer d’une langue à l’autre, ce n’est pas seulement de rester clair au niveau des règles de grammaire et d’orthographe – comme je vous en ai déjà touché un mot dans mon dernier article. Une autre difficulté, c’est qu’il y a des mots quasiment intraduisibles – et qui pourtant vous servent tout le temps. Tenez, par exemple le verbe : to commute. J’ai vérifié dans le dictionnaire en ligne Collins français / anglais – dictionnaire qui, soit dit au passage, est mon meilleur ami de la vie chaque fois que je dois aller chez le coiffeur, chez le garagiste ou chez le dentiste – bref chaque fois que je dois utiliser un vocabulaire extra-théologique – car en anglais, je sais dire transsubstantiation, exégèse et sotériologie (1), mais frange, clignotant et aphte, je dois chercher à tous les coups. Et donc, dans le dictionnaire Collins, voilà la définition qu’ils donnent au verbe commute: faire la navette (quotidiennement, entre chez soi et un lieu de travail éloigné).

Et donc là, tout de suite c’est un signe : Un truc qu’il faut plus de treize mots en français pour le dire, autant le dire tout de suite, c’est qu’on en parle jamais. Conclusion (et voyez comme en un bond, on passe de la linguistique à l’ontologique (2)) : en France, le commute ça n’existe pas, ou si ça existe tout le monde s’en fout. Le commute, ça se dit « aller au travail » et le travail, de toutes façons personne ne veut en parler. Aux États-Unis, le travail, tout le monde trouve ça génial mais exception à la règle (et c’est pour ça qu’il y a un mot spécial), le commute, vous avez le droit de critiquer. Je dirais même plus, pour avoir des amis ici, c’est obligatoire de commuter et de parler de son commute et d’utiliser plein d’adjectifs pour parler de la circulation, avec crazy et insane en début de liste. Ce qui a pas mal d’avantages : vous arrivez au boulot le matin à 10h30 en disant « traffic was crazyyyyy on the beltway » et tout le monde incline la tête en continuant son travail. Pareil dans le sens inverse: vous quittez le boulot à 15h en disant que vous êtes « worried about this insane traffic » (en insistant sur le « in » de insane) » et personne ne vous dira rien non plus. Bref, le traffic c’est à la fois la plaie et la bouée de sauvetage du travailleur suburbain, son Kyrie Eleison professionnel qui lui permet à coup sûr d’obtenir l’absolution de la hiérarchie. Et c’est pour ça bien sûr, que le dilemme du washingtonien n’est pas très loin du dilemme du parisien: Comme le parisien qui déteste vivre à Paris mais ne quitterait Paris pour rien au monde, le washingtonien déteste conduire mais ne laisserait sa voiture au garage pour rien au monde. De toutes façons, bonne chance pour vous trouver un bus ou un métro en état de fonctionnement.

Moi, bien sûr, je ne me doutais de rien.

D’aller travailler, le premier truc que j’ai réalisé, c’est que j’allais avoir un chef – certes – des paroissiens – certes – une église – encore mieux – mais surtout que j’allais avoir un bureau. En deux ans de prêtrise itinérante, il était temps. Comme le disait Charles Wesley – considéré comme le père du père du grand réveil spirituel américain (3) et qui ironiquement n’a jamais trouvé de travail aux États-Unis: « The world is my parish« . Ou comme votre servante le disait à son Xav : « Mon bureau, c’est l’autel » – mais enfin, quand même, bonne chance pour vous installer une machine à café entre le calice et le ciboire.

Là j’ai un vrai bureau qui cumule avantages et inconvénients. Dans le désordre: mon bureau est à côté du bureau de mon chef, qui débarque à toute heure du jour pour utiliser ma poubelle (4), ma fenêtre donne sur la cour de l’école avec qui nous partageons les locaux – l’enseignement Montessori étant alternatif – les petits dansent sur la Macarena à l’heure de la récré. J’utilise mon propre PC et j’ai acheté ma propre bouilloire, car croyez-le ou non, mon chef et sa secrétaire ne boivent pas de café. Jamais.

Retour au travail...

Retour au travail…

Bref, du coup les premiers jours j’étais plutôt excitée. Après avoir fait du ménage, je me suis concoctée une petite ambiance feutrée. J’ai emmené mes livres favoris dont une Bible, mon mug favori avec marqué mon nom dessus, ma tisane anti-anxiété, mon châle pour les petits coups de froid, une photo de Xav, pour ne faire trop vieille fille non plus et, bien entendu, la photo de mon ordination – je n’ai pas franchi le cap d’avoir mon diplôme encadré, un must-have à l’américaine pourtant. Imaginez un peu : « Fanny, prêtre agréée » – faites moi confiance quand je vous parle de la vie éternelle, j’ai un certificat qui peut le prouver.

back to basics !!!

…Mon premier PowerPoint: Back to basics !!!

Bon, mais tout ça bien sûr, c’était l’enthousiasme des débutants, car bien entendu, là où je passe le plus de temps, c’est quand même dans ma voiture.

Ce n’est pas trop mal pourtant comme commute, car je suis dans le sens inverse de la circulation. Puisque je travaille à la campagne, au lieu d’aller vers Washington, je m’en éloigne, ce qui me brise quand même un peu le cœur au passage, certes mais sur le chemin du retour, j’ai la satisfaction de voir des files de voitures sur la voie opposée – alors que moi, Tintin, sauf quand il y a des bus scolaires: arrêt imposé jusqu’à ce que le dernier marmot ait récupéré son sac à dos au fond du car, ce qui, croyez-moi, peut prendre jusqu’à dix minutes. Mais c’est ça ou $200 d’amende (et croyez-moi aussi, c’est vrai, j’ai un reçu qui peut le prouver…). Non, ce qui me prend le plus de temps, c’est d’aller rendre visite à truc muche à l’église pas loin, passer m’acheter un sandwich juste à côté, visiter l’association en bas de la rue (autre subtilité de traduction, en anglais « c’est en bas de la rue » ne veut pas du tout dire que vous pouvez y aller à pied). Au final, le GPS  est devenu mon meilleur ami de la vie (après mon dictionnaire), et la Buick se remplit semaine après semaine des objets les plus inattendus : pack d’eau, boutons de col, chaussures de rechange, recharge pour mon téléphone, un nouveau CD de Miley Cirus (puisque, apparemment, elle m’inspire pour mes sermons).

Le Gs bien sûr ne résout pas TOUS les problèmes

Le GPS bien sûr ne résout pas TOUS les problèmes de circulation…

Mon chef a bien compris le coup.

Pour m’encourager, il m’a offert un large magnet « St D’s, Episcopal Chruch » car un autre must-have à l’américaine c’est d’afficher votre vie sur votre voiture, on appelle ça des « Bumper Stickers ». De façon très utile, le Bumper Sticker indique aux gens qui sont coincés derrière vous au feu rouge, là où vous allez à l’église, quelles sont les associations où vous militez, si vous avez fait l’armée, si vos enfants sont à l’université et où, quels sports ils pratiquent, si vous avez adopté votre chien et quelle race – je ne déconne pas – si vous pensez que Jésus sauve ou non. Et bien sûr si vous êtes favorable au port d’armes, à l’avortement, à Hillary Clinton. Le bumper sticker : un truc que je m’étais juré de ne jamais faire, mais contrarier son chef les premières semaines ? Je me suis abstenue de lui dire ma pensée profonde : en tant que conductrice, je ne suis pas sûre de faire forcément une publicité très favorable à l’église. Ne riez pas, la semaine dernière nous avons reçu un mail d’un gars fou furax parce qu’une des nos paroissiennes (porteuse du joyeux autocollant) lui avait fait une queue de poisson. Il concluait son message en déclarant que des chrétiens avec un tel comportement, c’était à en perdre la foi. Autant vous dire que j’ai la pression si, en allant ou en revenant du boulot – en commutant –  je risque d’annuler les effets de ce que mon boulot est censé produire (la foi chez les autres, donc). La tension est redoublée pour moi qui doit porter le col au volant. Un prêtre qui jure ça fait très, très mauvais effet. Alors l’autocollant St D’s, c’est un peu un garde-fou. Et puis, c’est vrai que ma voiture, au final, autant l’admettre, c’est un peu mon bureau.

Je me demandais récemment si je ne pouvais pas l’aménager en église provisoire, avec un crucifix ou deux sur le tableau de bord, histoire de prier pendant les bouchons? Un bon moyen de retourner à la prêtrise itinérante, sans doute.

Ce week-end, nous avons visité le cottage d'été d'Abraham Lincoln, où nous avons appris que le sieur, lui aussi, "commutait" : tous les matins, une demi-heure à cheval jusqu'à la maison blanche.

Ce week-end, nous avons visité le cottage d’été d’Abraham Lincoln, où nous avons appris que le sieur, lui aussi, « commutait » : tous les matins, une demi-heure à cheval jusqu’à la Maison Blanche. Ce n’était pas exactement le bon temps : le pays était à feu et à sang pendant la guerre de sécession, les soldats et les vaches campaient sur le National mall et l’eau du Potomac vous refilait le Thyphus tellement elle était polluée (c’est comme ça que Lincoln a perdu son fils). Bref, l’optimisme à l’américaine est confirmé : de nos jours on s’en sort bien avec des bouchons.

(1) Transsubstantiation: doctrine hautement prisée par les catholiques pour qui, au moment de la prière eucharistique, le pain et le vin se transforment en corps et sang du Christ. Les anglicans n’y croient pas. Ils pensent que le Christ est présent dans l’Eucharistie, mais que le pain reste du pain et le vin reste du vin. Les catholiques n’ont jamais prétendu le contraire, les molécules de pain ne sont pas des molécules de Jésus, ils ne sont pas fous non plus les catholiques. N’empêche tout le monde se bat là-dessus depuis quatre cents ans. Plutôt que de sauver le monde, ça nous occupe.
(2) L’ontologie mes amis, c’est la science de l’être. C’est à dire l’étude de la réalité, ce qui existe. J’attends de rencontrer un docteur de l’irréel ou de l’inexistant, pour rigoler.
(3) « Ma paroisse, c’est le monde entier ». Plus de détails sur la Wikipédia. Pendant mes années de chômage, je me suis beaucoup identifiée à Charles Wesley et je trouve sa citation imparable.
(4) Corbeille recyclable. Il n’en a apparemment pas une à lui, une idée de cadeau de Noël ?
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Catch Me If You Can

Je ne vous le cache pas : d’avoir repris le blog, je me suis posée beaucoup de questions.  Est-ce que mes lecteurs vont toujours m’aimer ? Est-ce que j’ai encore des choses intéressantes à raconter ? Est-ce que je sais encore encore me servir de Word Press? Parce que j’ai la chance d’avoir un service de dépannage d’urgence informatique 24h/24h à la maison (qui en fait rêver pas mal…) et parce que mes lecteurs ne m’ont pas laissée tomber, je crois que c’est cette avant-dernière raison qui a pas mal prévalu, du moins ces deux dernières années. Je crois que j’ai souffert d’un gros phénomène de décompression. Le séminaire, c’était tellement énorme que je crois qu’après l’ordination, je me suis dis: Est-ce qu’il peut encore vraiment m’arriver quelque chose qui mérite d’être raconté ? Et quand on y pense, c’est vrai que c’était pas complètement idiot non plus de se poser la question.

Pourtant, si on y réfléchit la relation au lecteur, c’est un peu comme une relation de couple, ou même une relation amicale. Ce qui compte, avec les années qui passent, c’est de bien se connaître tout en continuant à se surprendre un peu. Et de temps en temps même, un peu beaucoup.

Tenez, moi avec ma copine Zaza : Presque 15 ans qu’on se fréquente. Et l’expatriation n’a pas changé grand chose car depuis quatre ans, on continue à s’envoyer des mails trois fois par semaine pour échanger des informations cruciales: Qu’est-ce que tu as fait ce week-end ? Quel temps il fait à Grenoble ? Qu’est-ce que tu as mangé ce midi ? (Limite). De ma vie, elle a tout connu Zaza : Le secrétariat, le militantisme à Greenpeace, le mariage avec Mr Belanger,  l’église St Marc, les cours d’hébreu à distance, le départ aux États-Unis, le séminaire et l’ordination – à laquelle elle a même participé sous le pseudo exotique (américainement parlant) de « Zaza from Aubenas », pour jouer du ukulélé. Elle a même partagé un cheesecake avec mon évêque. Bref au bout de 15 ans, Zaza, difficile de la surprendre encore (Il faut dire qu’elle m’a pas mal surprise, elle aussi). Mais là quand même, quand elle a reçu mon mail du week-end dernier, Zaza, elle a halluciné.  En espérant ne violer aucun droit d’auteur, je me permets de la citer, en français de Molière dans le texte :

« Mais mais mais noooooon?? Mais mais mais c’est pas vrai?? Mais mais mais c’était bien?? Excellent!! »

Alors qu’était-ce donc me demanderez vous – eh bien entre un coucou et un bisou, je lui avais envoyé la photo suivante:

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Je vous le donne en mille : Une photo de stade prise avec mon téléphone. Ce qui voulait dire, si vous réfléchissez vite et que vous savez lire entre lignes qu’il fallait quelqu’un pour tenir le téléphone. Que le téléphone aurait pu difficilement aller au stade tout seul, et en admettant qu’il ait été volé ou piraté, comment pouvait-il envoyer tout seul  un mail à Zaza ? La conclusion la plus logique – bien que la plus improbable – était que c’était moi qui tenais mon téléphone, pour la bonne raison que dimanche, j’étais au stade.

Je vous rassure tout de suite : ça a complètement commencé sur un malentendu.

Le problème quand vous co-habitez avec un peuple qui a tendance à trouver à peu près tout « exciting », « awesome », ou, dans le pire des cas : « fun », c’est que, même si à la base vous êtes plutôt d’une nature méfiante, au bout d’un moment, quand une opportunité quelconque – y compris la plus improbable – se présente à vous, vous vous dites « Après tout, pourquoi pas ? Au pire ce sera distrayant. » Et donc la semaine dernière quand Xavier m’a appelée du boulot pour me dire que son fournisseur de photocopieuses lui proposait des tickets gratuits pour aller voir un match de base-ball, je lui ai dit « Fonce ». Ces tickets, c’était l’occasion. Je veux dire, en quarante ans d’existence, je n’ai jamais mis les pieds dans dans un stade (sauf pour le concert de Taylor Swift, mais je ne suis pas sûre que ça compte comme du sport). Mais c’est vrai qu’aux États-Unis, le base-ball c’est tellement énorme. Le base-ball c’est l’école de la vie. Et puis, je me suis dit « Au pire, ce sera distrayant ». « Et même (ma nature française reprenant le dessus) si ce n’est pas « fun », au moins ça ne nous coûtera pas grand chose ». Ce qui n’est pas tout à fait vrai, puisque dix minutes après, Xavier me rappelle pour me dire qu’entre temps les tickets sont déjà partis. Pour le réconforter – ou peut-être parce que moi-même j’étais déjà pas mal emballée – je nous trouve deux billets à $12 chacun sur le site web du National Park (+4$ de taxes, + $6 de frais de dossier: $32) – auquel il faudra ajouter – mais je ne le sais pas encore – les $25 de Parking (Soigneusement organisé par les mamas black du quartier qui vous indiquent les bons coins et vous aident même à manœuvrer pour cette petite somme), les $16 pour deux hot-dogs, les $8 pour une portion de frites, et les $10 pour deux sodas, sans compter bien sûr la balle et le magnet souvenir $8 + $6 – soit $105 en tout. Un peu cher pour un truc gratuit, mais au final on a passé un super dimanche après-midi.

Parce que là encore, je vous rassure tout de suite, c’était dimanche certes, mais après le service, juste le temps de changer l’aube pour une paire de jeans (1) mais je n’ai pas changé de crèmerie, surtout seulement après 15 jours d’embauche…

100_3882_smallC’est vrai pourtant que le sport c’est un peu comme la religion. Au stade, c’est comme à l’église (Pardonnez-moi, j’allais dire : « C’est comme dans la vraie vie ») : on se lève, on s’assied, on lance sa casquette, on communie au coca et aux frites, on chante en chœur. Mr Belanger a même failli verser sa petite larme pendant le « God Bless America ». On rigole aussi, car il y a aussi pas mal de trucs incongrus : pas de pom pom girls mais les présidents des États-Unis qui font la course autour du stade, et comme dans les films romantiques où à la fin ils se demandent en mariage devant tout le stade, le cameraman passe dans les rangs.

George Washington et Théodore Roosevelt (de dos)

George Washington et Théodore Roosevelt (de dos)

Et du coup, entre le fait de regarder les gens à l’écran, de chanter des trucs  et surtout de refaire le plein de frites en faisant un saut à la boutique de souvenirs, vous en oublierez presque que vous êtes là pour voir un match. Car ce n’est pas tout ça le sport :

Au stade, il y a aussi des matchs.

Vous me direz, c’est du base-ball bien sûr. Contrairement aux américains qui sont tombés dedans quand ils étaient petits et chez qui les effets sont permanents, le base-ball, est-ce que vous pouvez vraiment y comprendre grand chose quand vous êtes nés de l’autre côté de l’Atlantique ? Ben Xavier a réussi à suivre un peu ayant cherché les règles du jeu sur la Wikipédia avant de venir – une approche totalement geekesque de la chose, mais au final assez efficace. Quand à moi, après trois heures dans les gradins / boutiques / barques à frites, j’avais au moins compris ce que c’était qu’un home-run. Et croyez-moi, si je peux le faire, vous pouvez le faire aussi.

Mais au final, ce qui a le plus retenu mon attention dans le jeu quand même, c’est ce truc incroyable qu’un mec à un bout du terrain lance une balle, n’importe où, en l’air en général, et que de l’autre côté du terrain, à genre 150 mètres, un mec court, s’arrête, tend le bras et blam: la balle tombe pile au creux de sa main. C’est là que mon cerveau de prêtre n’a fait qu’un tour. C’est là que d’un coup, de la simple analogie sport / religion, je me suis trouvée d’un coup transportée au cœur de la métaphore théologique. Parce que le stade, oui, c’est un peu comme l’église. Au milieu de tout le decorum et des distractions, il ne faut pas oublier ce qui est vraiment en jeu au final : Un Dieu qui est capable de nous attraper au vol, quelque soit la trajectoire que notre vie a prise – et bien souvent juste avant qu’on s’échoue sur le sol – et cela à tous les coups (alors que l’attrapeur lui se loupe quelque fois). Dieu, c’est  un peu comme un vieil ami : toujours là et en même temps, toujours capable de nous surprendre.

Voilà. Voilà donc ce qui se passe quand on est une intello et qu’on part voir du sport. Mais au-delà de ça, bien sûr la morale de l’histoire c’est qu’ils ont raison les américains : le base-ball c’est l’école de la vie. En plus c’est distrayant. Et modique. Ou pas loin.

Je vous laisse méditer en vous proposant quelques jolies images prises par Xav (Pendant le passage de l’aube aux baskets, j’ai oublié mon appareil, d’où les photos avec le téléphone et le mail à Zaza…)

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 (1) Est-ce que c’est correct, en français de Molière, de dire une paire de jeans? J’avoue qu’en plus d’oublier systématiquement le pluriel des adjectifs, je commence à me poser des questions invraisemblables sur ma propre langue. L’autre jour, je me demandais si c’était correct de dire en français « je suis dans le métro »(J’avais quand même un gros doute sur le « je suis sur le métro »). Il va falloir que je ponde un article sur les anglicismes un de ces jours…
Et au fait, puisque c’est le 25, sinon encore ici mais déjà en France, bon anniversaire Zaza !! Et joyeux quarante ans…
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Un éléphant, ça Trump énormément…

Aux États-Unis, l’horreur de l’abomination, c’est Donald Trump qui se présente aux primaires du GOP pour les présidentielles, le parti qu’on appelle familièrement « Les Républicains » et encore plus familièrement « Les Éléphants » (et il y a sans aucun doute d’autres appellations encore plus familières que je ne nommerai point ici). GOP, pour votre édification, ça veut dire Grand Old Party – c’est Xavier qui vient de me le dire parce que je ne m’en souviens jamais.

En tout cas, si vous n’aimiez pas les Républicains, avant Donald Trump, vous n’aviez encore rien vu. Vous vous souvenez peut-être de l’époque où il faisait la une de Paris Match (si vous lisez Paris Match) avec Ivana et leur divorce à sensations. C’était le bon temps, le temps où même s’il était déjà très grande gueule, il se contentait de construire des gratte-ciel à New-York. Sauf que maintenant, après avoir construit des tours, l’homme veut se lancer dans le mur. Pardon, je veux dire : se lancer à construire un mur. Un mur de 3145 km, entre le Mexique et les États-Unis – pour prévenir et au besoin punir toute immigration illégale et surtout pour préserver l’économie nationale, c’est à dire pour assurer de la tranquillité de ses dollars. Ce n’est pas une première. Au moment de l’épidémie d’Ebola, Trump avait déjà recommandé de rapatrier tous les médecins américains et d’interdire les vols à destination et en provenance d’Afrique noire.

Donald, va donc faire une tour et fiche-nous la paix... Une vue de New-York prise du Rockfeller Center, autre joyeux milliardaire américain...

Donald, va donc faire une tour et fiche-nous la paix…
Une vue de New-York prise du Rockfeller Center, autre joyeux milliardaire américain…

Trump, c’est toutes les valeurs viriles les plus dégénérées concentrées en un seul homme : argent, pouvoir, moi d’abord et les autres ils peuvent crever. Bref, dans mon esprit les choses sont claires : il y a le Christ, il y a l’ante-Christ. Et il y a Trump : l’ante-Xav du Xav.

Du coup, je n’ai pas pu m’empêcher de prêcher là-dessus.

Ça m’a un peu stressé d’aborder un sujet politique pour un premier sermon. On n’est pas vraiment censé faire ça en tant que prêtre où la neutralité (et bien souvent a langue de bois) est de rigueur.Et puis à Washington, il vaut mieux savoir de quoi vous parlez avant de vous lancer là-dedans. Mais au final, ce n’est pas un grand risque. Trump, tout le monde le trouve tellement ridicule,  c’est un peu comme de taper sur Le Pen quand on est en France. Ou de dire à l’antenne: « Moi ce qui révolte, c’est l’injustice dans le monde », comme dans ce sketch hilarant des Inconnus .

Non, à la réflexion, je crois que finalement, le plus gros risque que j’ai pris aujourd’hui dans mon sermon, ça a été de citer Miley Cyrus. Ça ne le fait peut-être pas pour un premier sermon, surtout quand vous avez été embauchée sur la base d’une maîtrise de philosophie et d’un master de théologie, mais bon moi je trouve que c’était assez approprié.

Bah, vous me direz ce que vous en pensez, si vous avez le courage de me lire…en anglais.

(PS: En tous cas l’aventure continue, je ne me suis pas fait virer)

Sermon 0920

 

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La petite église dans la prairie

Je crois que j’ai déjà mentionné à l’occasion dans un blog précédent cette mauvaise blague qui dit que, quand Dieu veut vous punir, il vous exauce. La leçon à en tirer (soi-disant) c’est que vous savez ce que vous voulez, alors que Dieu sait ce dont vous avez besoin. Et du coup, dans la vie quand finalement vous réussissez à avoir ce que vous voulez, vous êtes bien contents au début mais rapidement vous commencez à déchanter parce que vous vous rendez compte qu’au fond, ce n’est pas du tout ce dont vous avez besoin. Dieu, qui est plus malin que vous, le savait déjà, mais parfois, surtout si vous  lui cassez les pieds, il vous laisse faire le constat par vous-même.

Bref, bien entendu, ce n’est ni du Luther, ni du Calvin, pas même du Benoît XVI, c’est juste de la théologie à la mords-moi le nœud – même si d’un point de vue psychologique, ce n’est pas toujours faux non plus.

En ce qui concerne, je me dis que si cette histoire est vraie, ce qui est rassurant c’est que Dieu, je dois complètement être dans ses petits papiers (ou dans son livre de vie, c’est selon) parce que chaque fois que je lui demande un truc, sans chercher une seconde à me punir, il me donne complètement autre chose sans me poser de questions.

Si vous avez suivi l’entre deux blogs, vous n’êtes pas sans l’ignorer. Pendant deux ans, j’ai demandé à Dieu de pouvoir nourrir les pauvres, convertir les dealers et réconforter les prostituées et les alcooliques en célébrant des Eucharisties sur les trottoirs des villes (ce que j’ai eu tout de même l’occasion de faire à de maintes reprises) – bref, j’ai demandé à Dieu qu’il fasse de moi un pasteur des rues, un downtown priest – tout en rêvant secrètement bien sûr de devenir une uptown girl par la même occasion. Mais voilà, depuis 15 jours, j’ai compris que j’allais dire adieu aux mendiants des stations de métro et par là même adieu aux rooftops, galeries d’art et jogging dans Central Park avec Madonna (Ayant déjà bien investi New-York, je n’avais cependant pas encore tout à fait conclu sur cette dernière partie de mon programme) puisque me voilà propulsée en pleine banlieue résidentielle pour mon premier emploi.

Photo :

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Voilà : c’est grand. c’est beau, c’est calme, c’est dans la campagne, à une demi-heure de la maison et à l’orée des bois. Exit le vrombissement du traffic, bonjour les cris d’enfants (1), exit les dealers et les alcooliques, bonjour les renards et les biches. De pasteur des rues, je deviens pasteur des champs.

Bien sûr, il y a toujours de la logique dans l’action divine, puisqu’après avoir donné la communion à Obama et prêché devant le directeur du FBI pendant mes folles années estudiantines, je vais maintenant pouvoir administrer les sacrements et mes bons conseils à des espions, les bureaux de la CIA étant à cinq minutes en bas de la rue.

Mais quoiqu’il en soit, il faut bien le dire, depuis 15 jours, je savoure le fait de n’avoir pas été exaucée. Parce que faire ce qu’on veut, c’est bien – mais au bout d’un moment il faut bien l’avouer, c’est aussi un peu fatiguant. Au bout de deux ans de ministère itinérant, à courir d’une église à l’autre, je me rends compte qu’avoir un cadre reposant, un chef sympa et des paroissiens normaux au final c’est peut-être pas mal non plus. Dieu m’envoie ce dont j’ai besoin. Il faut dire que j’ai beaucoup travaillé la question et fait récemment une importante découverte. Il semblerait en effet, après quelques années d’analyse, que j’ai à peu près le cerveau d’un Shaddock, cerveau dont le principe de fonctionnement de base est le suivant : Pourquoi faire simple, quand on peut faire compliqué ?

Ma mère m'envoie une carte de félicitations pour mon nouveau boulot avec deux plaquettes de Xanax, juste au cas où le grand air ne suffirait pas tout à fait.

Ma mère m’envoie une carte de félicitations pour mon nouveau boulot avec deux plaquettes de Xanax, juste au cas où le grand air ne suffirait pas tout à fait.

Bien sûr, les défis ne manqueront sans doute pas non plus. Mon contrat de travail stipule que j’ai été embauchée pour : « Proclamer l’Évangile, aimer et servir le peuple du Christ, le faire grandir et le fortifier pour glorifier Dieu
dans cette vie et dans la vie à venir ». Sachant que mon dernier poste consistait à « Faire des photocopies, répondre au téléphone et affranchir le courrier », j’espère pouvoir me contenter de cette marge de complication…et apprécier davantage, quand c’est possible, la simplicité et la douceur de la vie. Comme le dit joliment ma psy: « Votre instrument de travail, c’est votre âme, alors il faut en prendre soin »

Du coup, je me dis Dieu c’est c’est comme si, au milieu de mes grands projets, il me disait d’aller un peu jouer dehors. Moi, mon cerveau et mon âme, le grand air nous feront sûrement du bien !

(1) Mon église loue une partie de ses locaux à une petite école. J’aurai sûrement l’occasion d’y revenir.
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Urbi et Washingtoni

Et donc l’événement de la semaine à Washington, c’est la reprise du blog – bien entendu. Le pape François, qui n’en croit pas ses oreilles, aurait même décidé depuis Rome de venir faire un tour en ville, histoire d’en avoir le cœur net – et les esprits malins diront : histoire d’étouffer dans l’œuf ce foyer de rébellion où les dernières seront les premières et où ce sont les femmes qui portent la culotte et la chasuble (à ce propos, j’espère que ma bannière d’en-tête vous a fait un choc parce que, pour tout vous avouer, moi-même de me voir célébrer l’Eucharistie, je n’en reviens toujours pas).

Mais non bien sûr, le pape François, il ne veut de mal à personne. Le pape François, tout le monde l’aime. Je dirais même plus : Le pape François, il est sympa.

Pour en être bien convaincus, et pour nous préparer mentalement à cette mémorable visite du Souverain Pontife (Parce que d’ un point de vue logistique c’est réglé apparemment : tout le monde est sur les dents et la moitié de la ville est bouclée) – pour nous préparer mentalement disais-je, mon époux et moi-même avons récemment assisté à une conférence du National Geographic, dont le siège est sur la 17eme avenue – avec un super magasin à babioles décroissantes que j’aime bien fréquenter. Une conférence dont le but non dissimulé était de nous prouver, si besoin est que donc François, il est sympa. Bon, plus précisément, il s’agissait de nous décrire la vie quotidienne au Vatican et le nouveau « leadership style », en latin dans le texte, du prélat. Pour ce faire un reporter, un journaliste et l’archevêque de Washington, du côté catholique de la force.

On a appris plein de trucs – digne d’un grand mensuel international.

Le pape, il conduit une Ford focus. Il a du mal à sortir de sa Ford avec tout son bardas mais il faut souffrir pour être humble. Le pape, il est toujours content de voir des gens, il bénit le ventre des femmes enceintes et fait des selfies avec les ados. Le pape, il est le même à l’écran que dans la vraie vie. Parce que le pape, il a un secret nous confie Machinchouette. Le pape, il a inventé un truc révolutionnaire : « Au lieu de dire aux gens ce qu’ils doivent faire, qui est bien ou ce qui est mal, les gens, il va à leur rencontre. Pour leur parler. »

Mais c’est bien sûr. J’en ai le souffle coupé.

Je ricane comme ça, mais on s’y laisse prendre, avec les photos et tout, les colombes, les enfants de chœur, la foule en extase. Au bout d’une demi-heure d’humilité franciscaine j’étais déjà au bord des larmes, consternée par – moi Fanny simple prêtre – ma dévorante ambition et mon affreux consumérisme (je vous rappelle que je roule en Buick « Regal » où on peut largement caser un pape et au moins trois archevêques – mitres et crosses incluses). À ma pause pipi, j’ai failli acheter en douce le bouquin du reporter où on voit François qui parle à Dieu dans la chapelle Sixtine (J’ai juste eu peur que Xavier se foute de moi) mais la conférence durait deux heures de plus, je crois que je montais sur l’estrade pour demander à Monseigneur Machinchouette de m’accorder l’absolution de mes péchés schismatiques. Heureusement il y a aussi un dieu pour les anglicans et le salut est venu quand soudain la rédactrice en chef du National Geographic, fine mouche et auto-proclamée « Non catholique et pas même chrétienne » car aux États-Unis ça ne se fait pas de dire qu’on est athée, pose la question que, emporté par le lyrisme reportario-pontifical, plus personne ne se posait :

« Et alors, du coup, est-ce que ce changement de style, ça va apporter des réformes concrètes dans l’église, par exemple la communion pour les divorcés remariés ou la possibilité d’avoir des femmes prêtres ? »

L’assemblée – pardon – l’assistance retient son souffle. Un ange passe mais retourne d’où il vient et c’est Monseigneur Machinchouette qui brise le silence :  » Oui alors voyez je crois qu’il s’agit d’un changement de style, mais pas non plus d’un changement de l’enseignement des Évangiles. » Sur quoi il ajoute, avec un petit sourire, fier de son coup : « Je crois que ce que nous enseigne le pape, c’est que même si on n’est pas parfait ce n’est pas grave, on peut quand même être chrétien ».

Alors là vous m’excusez, mais je redescends direct de mon petit nuage. Non mais parce que François sympa et tout mais théologiquement – vraiment ? Machinchouette, 60 ans de ministère (Il nous a confié avoir « séché les cours au séminaire » pour assister à la prise de fonction de JFK) et il nous sort ÇA ?? Jésus aurait vraiment dit quelque chose sur les divorcés qui communient et sur les prêtres qui célèbrent les messes avant même d’avoir institué l’Eucharistie ? Et Jésus aurait sous-entendu qu’être divorcé ou qu’être une femme, c’était être moins parfait qu’autre chose, mais enfin bon, circulez, ça va pour cette fois mais qu’on ne vous y reprenne pas ?

Bah moi je dis, je ne sais pas mais quand même : Ça ne ressemble pas trop à Jésus.

Alors peut-être que finalement, un petit article par ci par là – pas si con. Pas si inutile les contre pouvoirs – même si je ne suis qu’une petit voix qui crie dans le désert – hé hé – ou qui s’indigne sur la toile. Je vous rassure, je ne suis pas  parfaite c’est vrai et je ne roule certes pas en Ford focus, mais moi aussi je suis la même sur Internet que dans la vraie vie.

Et leur bouquin à 40 dollars, au National Geographic, ils peuvent se le garder.

On pourra toujours lire le blog, en attendant.

Fanny, Francis has NOT endorsed you!

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